Ce que prévoit la loi en cas de violation de l’espace aérien algérien par le Maroc
Par Kamel M. – L’interdiction de survol de l’espace aérien algérien décidée par le Haut Conseil de sécurité (HCS) à l’encontre du Makhzen signifie que tout avion battant pavillon marocain ou immatriculé au Maroc sera considéré comme un avion ennemi et subira ce que les lois internationales prévoient dans ce genre de situation. Dans un article sur l’emploi de la force aérienne contre les aéronefs civils, l’officier de l’armée de l’air française Anne De Luca, détentrice d’un PhD, explique que l’Etat qui subit une violation de son espace aérien «n’est pas démuni face à un aéronef civil». «Le principe de la souveraineté aérienne lui confère le droit d’agir afin de faire cesser l’intrusion», précise-t-elle.
«La souveraineté de l’Etat sur l’espace aérien surplombant son territoire terrestre et sa mer territoriale constitue un principe établi du droit international coutumier. La Convention de Paris, signée en 1919, est le premier accord multilatéral sur la réglementation de l’espace aérien à consacrer le principe de souveraineté aérienne. Celle-ci est, en outre, affirmée par la Convention de Chicago [qui stipule que] les Etats contractants reconnaissent que chaque Etat a la souveraineté complète et exclusive sur l’espace aérien au-dessus de son territoire.»
«Sauf engagement conventionnel contraire, l’Etat est libre de réglementer, voire même d’interdire le survol de son territoire [et] tout vol non autorisé constitue alors une atteinte à la souveraineté de l’Etat sous-jacent, comme l’a confirmé la Cour internationale de justice, [selon laquelle] le principe du respect de la souveraineté territoriale est directement enfreint par le survol non autorisé du territoire d’un Etat par des appareils appartenant au gouvernement d’un autre Etat», souligne le commandant de l’armée de l’air française.
«En droit international de l’aviation civile, le principe est la fermeture de l’espace aérien», fait-elle savoir en édictant les mesures autorisées en cas de violation de l’espace aérien. «La Convention de Chicago, note l’auteure de l’article, prévoit plusieurs dispositions en cas d’atteinte à la souveraineté aérienne d’un Etat : chaque Etat, dans l’exercice de sa souveraineté, est en droit d’exiger l’atterrissage, à un aéroport désigné, d’un aéronef civil qui, sans titre, survole son territoire ou s’il y a des motifs raisonnables de conclure qu’il est utilisé à des fins incompatibles avec les buts de la Convention» y afférente. La Convention de Chicago indique qu’il peut aussi être donné à cet aéronef «toutes autres instructions pour mettre fin à ces violations». «A cet effet, les Etats contractants peuvent recourir à tous les moyens appropriés compatibles avec les règles pertinentes du droit international», dicte encore cette loi instaurée par l’Organisation de l’aviation civile internationale (OACI) et entrée en vigueur en 1947.
«Le recours à la force reste possible pour intervenir auprès d’un aéronef civil en situation illicite, pourvu que son intégrité ne soit pas mise en péril. Ce qui est donc interdit, c’est le recours aux armes et non le recours à la force», relève l’officier de l’armée de l’air française qui explique que l’aéronef qui se rend coupable de violation de l’espace aérien peut être sommé d’atterrir ou de changer de cap par des intercepteurs ou l’utilisation de balles traçantes à titre d’avertissement. L’armée peut également recourir à des tirs de semonce lorsque le pilote n’obtempère pas, à condition que la sécurité des passagers soit sauvegardée.
Sur le plan juridique, l’interception peut ouvrir un droit de poursuite lorsque l’aéronef qui a violé les règles de survol fuit vers l’espace aérien international. «La poursuite ne peut être mise en œuvre que par un aéronef d’Etat [et] l’opération ne doit pas violer la souveraineté aérienne d’un autre Etat, sauf si celui-ci donne son consentement exprès», énonce ladite convention. Par ailleurs, la poursuite doit commencer immédiatement après la commission de l’acte délictueux et présenter un caractère ininterrompu.
L’histoire de l’aviation civile a connu plusieurs épisodes où des avions ont été abattus. Parmi ces appareils dits «hors-la-loi», il y a eu le cas d’un avion de la compagnie israélienne qui, en juillet 1955, a été détruit par l’armée de l’air bulgare alors qu’il volait au-dessus de la Bulgarie. En 1973, c’est un avion de ligne libyen qui subira le même sort alors qu’il traversait par erreur les territoires occupés par Israël et survolait des installations militaires. Un autre cas remonte à avril 1978, date à laquelle un avion sud-coréen sera intercepté et détruit par la chasse soviétique au nord de l’ex-URSS, alors qu’il survolait une zone stratégique interdite à la circulation aérienne. Un autre avion sud-coréen sera abattu dans l’espace aérien de l’ex-URSS en 1983, alors qu’il survolait une zone militaire stratégique.
Le Makhzen, qui a déjà poussé 10 000 Marocains, parmi lesquels un grand nombre d’enfants, à gagner l’enclave de Ceuta à la nage, au risque de leur vie, est capable des pires ignominies. Ses provocations n’ont pas de limites, bien qu’il sache qu’en face l’Algérie n’hésitera pas à utiliser tous les moyens en sa possession pour tempérer ses ardeurs téméraires.
K. M.
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