Un pied-noir à Zemmour : «Jamais un Algérien n’a touché un cheveu d’un juif»
Par Kamel M. – Commencée timidement, la campagne d’Eric Zemmour pour l’élection présidentielle française est désormais étalée au grand jour. Cris de ralliement de ses francs-tireurs : «2022, Zemmour aura le dernier mot» ; «Seul Zemmour peut sauver notre France en perdition» ; «Face à Macron, il n’y a plus que Zemmour». Le chroniqueur de CNews compte bien briguer la fonction suprême pour «débarrasser» la France de ses «intrus arabes et musulmans». Une partie de l’extrême-droite, «déçue» par le recentrement de Marine Le Pen, la cheffe de file traditionnelle de cette mouvance raciste, voit dans ce descendant de juifs d’Algérie l’arme adéquate pour «nettoyer au Karcher» des quartiers entiers interdits jusqu’à la police française, qui y est accueillie à coups de mortiers, et soumis au diktat de caïds locaux, armés jusqu’aux dents et prêts à en découdre avec une société française à laquelle ils n’ont jamais senti appartenir. Et pour cause.
Eric Zemmour joue sur cette dichotomie qui dure depuis les années 1960, période de décolonisation qui a coïncidé avec les fameuses «Trente Glorieuses» qui ont vu l’économie française connaître une explosion sans précédent au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Jusqu’au choc pétrolier de 1973, la main-d’œuvre exploitable et malléable et corvéable à souhait était encore la «bienvenue» dans une France qui se reconstruisait avec la sueur des anciens colonisés. Puis vint le sursaut d’orgueil des Arabes qui assécha les pompes à essence et freina l’essor de l’industrie française et faillit paralyser le pays. Depuis lors, l’immigré de la Sonacotra n’était plus perçu comme un mulet de bât auquel De Gaulle faisait porter la croissance pour assurer le bien-être des Français de souche.
Un juif d’Algérie a rappelé à Eric Zemmour qu’il est dans le faux s’agissant des «Arabes» et des «musulmans» qu’il présente, plus d’un demi-siècle plus tard, comme une menace sur l’essence même de la France où il a enfilé le costume du Gaulois croyant que cela lui serait suffisant pour se transformer en coq, emblème de la Gaule, lui qu’on rapproche souvent au vautour. «En ce qui concerne les propos d’Eric Zemmour, je suis [un] juif qui parle justement des Arabes d’Algérie», lui rétorque Marcel, un pied-noir d’Oran. «Eric Zemmour a la mémoire courte, il n’était pas né mais, moi, je suis né en Algérie en 1926», a-t-il indiqué tout de go.
«En 1940, lorsque les Allemands ont occupé la France, il y avait le gouvernement de Vichy. A cette époque, ce dernier avait demandé à tous les Arabes d’Algérie de spolier les biens des juifs, je précise bien, de spolier, de leur prendre tous leurs biens en leur assurant qu’ils ne seraient pas inquiétés. Le gouvernement de Vichy craignait, en fait, qu’ils se soulèvent pour leur indépendance», se remémore Marcel, du haut de ses 95 ans. «Pour la gouverne de M. Zemmour, il n’y a jamais eu un Arabe de toute l’Algérie qui a touché un cheveu d’un juif», a-t-il martelé. Et d’insister : «Ce n’étaient pas des amis, c’étaient mieux que la famille, tellement nous nous aimions.»
K. M.
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