Rabat veut rétablir les accords commerciaux avec l’UE : tentative vaine selon une analyse européenne
Le Maroc a lancé une riposte médiatique auprès de l’Union européenne pour rétablir les deux accords commerciaux de libre-échange avec l’UE, annulés le 29 septembre par le Tribunal de l’Union européenne, mais son action pourrait s’avérer vaine, selon une analyse publiée mercredi par l’Ecole de guerre économique (France).
«Grande perdante face à cette décision, la Confédération générale des entreprises du Maroc (CGEM) a décidé d’organiser une riposte médiatique que l’on pourrait qualifier d’une riposte de contre-influence auprès de l’Union européenne», écrit Achille Wagner, auteur de cette analyse, intitulée «Lutte informationnelle entre le Maroc et le Front Polisario concernant l’annulation des accords commerciaux UE-Maroc».
Vraisemblablement, il y aura appel de la décision. Mais «le Maroc dispose d’un laps de temps relativement court pour convaincre les différentes entités européennes du bien-fondé de cet accord contre les propos du Front Polisario», relève-t-il. Le Maroc dispose de deux mois pour faire appel à la décision à compter de la date de la prononciation du verdict.
«Cette lutte d’influence passerait par des campagnes de lobbyings visant à redorer l’image du royaume qui ne doit pas être perçue comme une puissance colonisatrice pillant des ressources naturelles d’un Etat souverain», relève l’auteur.
Mais cette démarche doit aussi convaincre que cet accord est bénéfique également au Front Polisario et aux populations sahraouies dans les territoires occupés, explique-t-il.
La CGEM a fait appel à la société française spécialiste en communication Open2Europe et a dépêché à Bruxelles Abir Lemseffer, la coordinatrice principale des relations de la CGEM avec les institutions de l’UE concernant le volet médiatique.
«Toutefois, cette montée au front médiatique risque de se heurter à la réalité géopolitique du Maroc à l’égard de certains pays européens», note l’analyse.
Actuellement, les ambassades de Rabat à Madrid, Berlin, Bruxelles et Paris restent sans ambassadeurs. De fait, «le royaume se trouve dans une situation stratégique complexe : comment délivrer un message aux acteurs européens sans utiliser la voix diplomatique ?» s’interroge l’auteur avant d’ajouter que cette action «pourrait se trouver vaine face aux capacités du Front Polisario qui bénéficie de soutiens sur la scène internationale pour porter ses revendications».
Par ailleurs, la stratégie informationnelle du Front Polisario qui repose sur la dénonciation constante du pillage des ressources naturelles du Sahara Occidental, en s’appuyant sur des ONG a porté ses fruits, selon l’analyse.
Plusieurs entreprises se sont retirées du Sahara Occidental à l’instar de l’entreprise allemande Continental qui n’a pas renouvelé son contrat d’exploitation de phosphate au Sahara Occidental occupé ou de la compagnie suédoise Epiroc qui fournissait des équipements miniers.
L’analyse rappelle que la décision du Tribunal européen du 29 septembre «présente des conséquences non négligeables».
D’une part, elle réaffirme «l’appartenance du Sahara Occidental au Front Polisario» et, d’autre part, elle «renforce la crédibilité de la RASD dans sa quête de reconnaissance» comme Etat indépendant auprès de la scène internationale, soutient l’auteur.
R. I.
Comment (5)