Deux Algériennes jugées en France pour avoir qualifié les harkis de «collabos»
Par Houari A. – On savait la question des harkis sensible en France, cette dernière ressentant des remords pour avoir abandonné ses supplétifs après l’indépendance de l’Algérie en 1962, mais on ne savait pas que ce problème jouissait de la même sévérité que la Shoah dont il est prohibé de douter de l’existence. A Montpelier, deux Algériennes viennent de l’apprendre à leurs dépens. En effet, le média local Actu nous apprend que «deux Héraultaises, Nora et Nadhira, ont été condamnées par le tribunal correctionnel de Castres, dans le Tarn, pour avoir accusé sur Facebook les harkis de traîtres et de collabos».
Les deux prévenues ont été poursuivies par une association dénommée Génération harkis et leurs amis, présidée par un certain Mohamed Djafour, pour «diffamation envers un corps constitué». Le tribunal a prononcé son verdit à l’encontre des deux femmes pour «allégations portant atteinte à l’honneur ou à la considération des harkis, en écrivant publiquement sur les réseaux sociaux on [ne] peut pas faire confiance aux harkis, ce sont des traîtres et les harkis, pfft, pourquoi pas les collabos des Allemands contre la France. Tout est bon pour gagner des élections, misère, les harkis ont tué des Algériens». Qu’y a-t-il de diffamatoire dans ces commentaires ?
«Même le général De Gaulle a traité cette catégorie de traîtres car il ne voulait pas d’eux en France», répond un Algérien établi en France. «C’est ce qu’il a dit à un officier en 1962 qui lui demandait ce qu’il voulait qu’il fasse des harkis», se remémore cette source. «De Gaulle lui a répondu qu’il ne voulait pas de ces traîtres sur le sol français», poursuit-elle, en soulignant que «ce sont des officiers proches de l’OAS et des pieds-noirs qui les ont aidés à rejoindre la France». «Preuve en est que le général De Gaulle les a parqués dans des camps où ils vivaient comme des sous-citoyens dans des conditions inhumaines», poursuit notre source.
Lors d’un voyage officiel en France, l’ancien président Abdelaziz Bouteflika, répondant à un journaliste français sur les harkis, lui rappelait que les Français qui ont pris fait et cause avec les nazis durant la Seconde Guerre mondiale étaient, eux aussi, des collabos, mettant en avant une similitude entre les deux cas. Les propos du défunt président avaient soulevé un tollé général en France, mais cela n’avait pas dépassé les articles et les tribunes d’indignation dans la presse. Cette fois-ci, l’affaire a été portée devant le tribunal correctionnel qui a jugé que les propos des deux femmes «tombent sous le coup du délit de diffamation, car ils font référence à des actes de collaboration avec l’Allemagne ou à la Guerre d’Algérie». «Traître est une notion diffamante, selon la jurisprudence de la Cour de cassation», a décrété la justice française qui a condamné les deux accusées à une amende de 1 000 euros chacune, plus 800 euros chacune au titre de réparation du préjudice moral et 500 euros solidairement pour rembourser les frais de justice de l’association. Les condamnations sont définitives.
Ce verdict résonne comme une mise en garde à l’avenir à l’égard de toute personne qui s’exprimerait sur les harkis. A l’obligation de croire à l’Holocauste, faute de quoi tout «révisionniste» est condamné à une peine de prison ferme, se greffe désormais celle de l’interdiction absolue de qualifier les harkis de collaborateurs du régime colonial sanguinaire français, auteur de crimes de guerre abominables en Algérie et dans tous les pays que la France a occupés, spoliés et aliénés par les armes.
H. A.
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