L’Algérie un pays exportateur net de stabilité
Une contribution de Saâd Hamidi – Notre pays, qui possède d’énormes atouts, évolue dans un monde qui se transforme rapidement. Il se doit de maintenir le cap dans ce monde houleux qui nous impose de compter d’abord sur nos propres moyens. Aux axes stratégiques, que sont l’agriculture, l’eau et l’énergie dont il faudra renforcer la maîtrise, il faudra veiller aussi à fédérer toutes les forces politiques de la nation pour arriver à bon port. Il y va de notre survie, l’application du principe de subsidiarité dans la gestion économique et politique au quotidien, la solidarité en termes de support des couches les plus défavorisées ainsi que la prise de conscience d’un destin commun doivent cimenter notre action pour une vision stratégique comme acteurs majeurs pour notre propre développement mais aussi en tant que locomotive pour un continent qui veut s’affirmer dans l’arène internationale. L’Algérie a joué, par le passé, le rôle de moteur dans la libération de beaucoup de pays sous le joug du colonialisme, elle est fondée aujourd’hui, à notre sens, à promouvoir et à défendre le développement et l’intégration économique du continent africain.
Mais, commençons par analyser l’environnement de notre voisinage immédiat qui est turbulent et qui va à l’encontre des intérêts de notre pays ainsi que ceux de la région du Maghreb et du Sahel.
Nous essayons de situer les contradictions fondamentales qui empêchent de bâtir un Maghreb homogène, ouvert sur le monde et fortement intégré sur le plan économique au seul bénéfice de ses populations. Notons, qu’il y a cependant des forces exogènes centripètes mais surtout des éléments endogènes qui sapent les fondements de la construction maghrébine et menacent la cohésion de la sous-région sahélo-maghrébine. Ces éléments endogènes sont nichés dans la Constitution marocaine.
En effet, l’article 42 de la Constitution marocaine précise ce qui suit : «Le roi, chef de l’Etat, son représentant suprême, symbole de l’unité de la nation, garant de la pérennité et de la continuité de l’Etat et arbitre suprême entre ses institutions, veille au respect de la Constitution […] et au respect des engagements internationaux du royaume. Il est le garant de l’indépendance du royaume et de son intégrité territoriale dans ses frontières authentiques.»
Manifestement, cet article contient une contradiction indépassable entre le respect des engagements internationaux, d’une part, et être garant de l’intégrité territoriale dans [les] frontières authentiques, d’autre part. Que sont, en fait, ces frontières authentiques ? Les dérives du Makhzen sont ahurissantes et ne sont même pas à proprement parler conformes à l’historiographie, tant la continuité du royaume est sujette à controverse. Mais, ce n’est pas notre propos dans cette contribution. Cela me rappelle une anecdote au sujet de la naturalisation de l’illustre mathématicien Kurt Gödel, qui est un logicien autrichien naturalisé américain. Pour devenir citoyen américain, Gödel devait subir un examen avec pour témoin, entre autres, Albert Einstein.
Ça devait être une formalité pour Gödel mais il prit la chose tellement au sérieux qu’il étudia, à fond, la Constitution américaine. Au juge qui lui disait que dorénavant il allait être citoyen d’une nation démocratique et non plus d’une affreuse dictature, Gödel rétorqua qu’il sait comment les Etats-Unis peuvent devenir une dictature et qu’il était prêt à le prouver. Le juge qui connaissait Einstein décida de terminer l’entretien sans l’explication qui ne sera jamais révélée. C’était en 1947, dire que Gödel a vu juste avant l’heure. On sait ce que les Etats-Unis ont fait au monde depuis. Au passage, le théorème de Gödel est d’une beauté saisissante(*).
Pour reprendre le fil de notre contribution, on découvre, ébahis, que la reconnaissance de la Mauritanie a pris neuf longues années avant d’être reconnue par le royaume du Maroc. De plus, dans les dernières années, la diplomatie marocaine entretient, à escient, la stratégie de «la tension permanente» chère à Bourita pour essayer d’engranger des bénéfices, quitte à faire appel à un régime d’apartheid qui prend en otage la Palestine et la plupart des gouvernements arabes corrompus qui lui sont inféodés. Le roi sait comment s’y prendre sournoisement à travers ses conseillers, de temps à autre, pour manipuler un sombre mufti pour proclamer le «jihad» contre un pays voisin souverain, et musulman de surcroît, ou un parti politique minuscule pour reposer éternellement le problème des frontières comme pour Ceuta et Melila. Il faut admirer en la matière l’ingratitude du régime du vice et du mal face à la compromission et au reniement historique de Pedro Sanchez. Les semaines et mois à venir peuvent révéler un (re)positionnement stratégique de l’Espagne vu le poids régional grandissant de l’Algérie. Wait and see.
Je salue au passage notre diplomatie qui repose sur des principes intangibles de respect des frontières héritées des indépendances, de non-ingérence dans les affaires d’autrui et de soutien des causes justes dans le monde. Notre approche du «voisinage positif» n’est pas une vue de l’esprit : l’Algérie est un pays exportateur net de stabilité, dixit M. Lamamra [Interview : 11 août 2014, Jeune Afrique].
Les trahisons et reniements de cette monarchie moyenâgeuse sont légion.
Nous sommes confrontés à un problème d’instabilité profond et grave qui empêche la construction du Maghreb et génère des situations conflictuelles récurrentes qui empoisonnent notre environnement. Partant de ces considérations, nous pensons qu’il faut travailler sans relâche à confiner le Maroc au rôle qui est le sien, à savoir un relais insignifiant du capital financier mondial lequel est en voie de décomposition avancée. La guerre en Ukraine pose les jalons d’un monde multipolaire. A l’horizon 2030, les prédictions avancent l’hypothèse d’une Chine détrônant les Etats-Unis sur tous les plans. Nous allons vivre énormément de soubresauts parce que le capital financier mondial ne se laissera pas anéantir sans créer un chaos indescriptible.
Concrètement, primo, il s’agit pour nous de contrer l’hégémonie du vice et du mal doublé de l’apartheid, en allant, à bouchée double, vers l’intégration maghrébine sans le Maroc. Déjà, l’Algérie s’attèle à le faire en adoptant le principe gagnant-gagnant avec les pays de notre voisinage immédiat.
Deuxio, le soutien du Polisario doit être un principe intangible et doit être clair pour tous nos dirigeants, sans exception aucune. Il ne faut surtout pas perdre de vue que par le passé, le troisième personnage de l’Etat, président de l’APN, et secrétaire général du parti du FLN, a déclaré que le Sahara Occidental est marocain. Nous avons des doutes qu’il y a eu compromission sur les principes fondateurs de l’Etat algérien, lorsqu’on voit qui a aidé ce personnage à gravir tous ces échelons. C’est que, à un moment donné, le sommet de l’Etat algérien a laissé accroire au Maroc que la voie était libre pour proposer sa vision de l’autonomie du Sahara Occidental sous sa houlette. Nous sommes en droit de nous poser de telles questions, l’avenir nous le dira.
Tertio, la société civile, les intellectuels, les artistes et les réseaux sociaux doivent travailler de concert pour soutenir et aider nos frères marocains qui veulent déchoir ce royaume du vice et du mal. Nous le disons clairement, coexister avec le royaume du vice et du mal ne nous mènera pas loin. Les forces vives du Maroc doivent travailler et préparer l’avènement d’une République juste et respectueuse des valeurs universelles. C’est à ce prix que le rêve d’un Maghreb uni et intégré sera possible !
S. H.
(*) Le théorème de Gödel, qui est une réfutation d’un modèle mécanique (ou mécaniste/déterministe) de la science, de la pensée et du monde, affirme en substance qu’un système arithmétique cohérent et non contradictoire contient inévitablement des propositions indécidables. Plus loin encore, il démontre qu’un ensemble d’axiomes contient une proposition que nous savons être vraie et qui est pourtant indémontrable à partir des axiomes en question (incomplétude).
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