Le chaos technique

Abderrazak Mokri, le chef du MSP. Archives/New Press

Une contribution de Saadeddine Kouidri – L’image du terroriste qu’on nous impose dès la première semaine du Nouvel An sur notre écran est celle d’un islamiste, et voilà qu’au lendemain le chef d’un parti islamiste est reçu par le Président. La programmation de ce montage affolant est une emprunte des nouvelles techniques du chaos, ennemi de la paix et de l’union. Il y a comme un docteur Folamour ou plus exactement un «spin doctor» amateur entre notre écran et le pouvoir.

Les antisocialistes et anticommunistes du monde ont eu raison de l’URSS, tout en jetant, les pays de l’Est dans le chaos, dont le comeback frappe l’Ouest et pousse plus, les pays européens, dans les bras états-uniens qui a pour conséquence, aujourd’hui, la lutte de la Russie contre l’OTAN et ses valets occidentaux. De cette opération militaire, la Russie arrive promptement à soutirer aux Etats-Unis le monopole du dollar. Cette énorme victoire est dédiée au Nouveau Monde. On se demande aujourd’hui pourquoi elle a tardé à le faire et non pourquoi elle l’a fait.

Cette incursion en Ukraine vient à point nommé pour, ne serait-ce, que de ralentir les dégâts de la déconscientisation par le chaos, qui tend à livrer davantage le citoyen aux mains de ses ennemis, de ses adversaires, de ses patrons, à l’appauvrir davantage et à le pousser à l’errance.

Si hier l’intelligentsia du Capital encourageait les prières dans les synagogues, les églises, les mosquées ou d’autres lieux sacrés, avant l’existence des radios et télés mainstream, aujourd’hui elle chemine des réseaux sociaux où elle crée des avatars d’électeurs potentiels pour servir au moment opportun le candidat milliardaire ou ultraconservateur aux élections, qui se déroulent dans le monde, en prenant le soin de bannir, de la campagne électorale, tout débat politique de fond, c’est-à-dire toutes les discussions sur les problèmes des difficultés de la vie de l’homme, de la pollution de la planète, abandonnant les pauvres à leur sort.

Faut-il rappeler que la gauche, les partis communistes, socialistes, les syndicats des travailleurs, le secteur public… sont des acquis des luttes populaires, consolidés par les révolutions modernes dont le but est de sortir l’humanité des injustices et des dominations,

Avec le monde virtuel que modélisent inlassablement les ingénieurs et philosophes du populisme global, Hollywood apparaît comme un enfant de cœur. Elle fabriquait du rêve pour donner l’illusion, alors qu’aujourd’hui leurs «spin doctors» cultivent la peur, l’anxiété permanente pour annihiler la réflexion. C’est aussi à cause de cela que l’irrationnel investit même les grandes écoles. Un écrivain et philosophe en charge d’un think tank italien semble obnubilé par «les ingénieurs du chaos», un secteur qu’il décrit si bien dans son livre et qui lui fait dire que : «Contrairement aux autres animaux, l’homme naît sans défense.» Certes, mais contrairement aux autres animaux, le bébé qui naît dans une demeure qui le protège, le défend et l’éduque n’est plus sans défense. Il accentue son erreur en écrivant : «Les concepts disparaissent, dans un processus darwinien», laissant sous-entendre que pour Darwin il n’existe pas de transformation, contrairement à la thèse du biologiste. C’est seulement dans son livre La Filiation de l’homme, écrit en 1871, largement censuré depuis où la sélection naturelle est appliquée à l’homme. Quand cette dernière aboutit à la négation de la négation ou l’élimination du plus faible devient grâce à l’évolution des instincts sociaux et du rationnel, synonyme de la protection du plus faible par le plus fort.

Pour continuer à dominer le système capitaliste ment sur l’évolution, car elle libère. Au moment où son idéologie manque d’argument, son intelligentsia y pallie, par la tromperie, la censure, l’interdit y compris par le changement de paradigme à la seule condition que cela ne nuit pas à l’intérêt économique. Son dernier secours est le populisme global qui prend son élan à partir des réseaux sociaux. Du virtuel toute, pour plomber le réel. Vous cherchez les embrouilles, vous tombez bien. Regardez-moi bien, chante pour nous dès 1957 le grand Elvis Presley.

La mithridatisation, cet empoisonnement à petite dose, lente, progressive pour insensibiliser est une pratique du colonialisme pendant l’occupation nous prévient notre cher Mohamed Dib. Quand on ne sait pas séparer le bon grain de l’ivraie, on tombe dans ce travers.

Celle ou celui qui dénonce Staline et non Hitler, De Gaulle, Harry Truman (bombes atomiques sur Hiroshima et Nagasaki) nous embrouille sur les limites des classes, pour nous entraîner à une concession. La dernière est celle de passer l’éponge sur ces associations qui reçoivent quelques poignées de dollars par des institutions de l’impérialisme et qui, avec Rachad et le MAK, ont mis en péril le mouvement citoyen du 22 décembre 2019 et ont fini par le blesser.

Les champions du mensonge sont dans la classe ennemie des travailleurs. Angela Merkel, l’ex-chancelière d’Allemagne et par la suite l’ancien président français Hollande avouent que les accords de Minsk n’étaient qu’un leurre, celui de donner du temps à l’OTAN pour mieux préparer l’Ukraine à la guerre avec la Russie. A ces deux ex-chefs, il est utile de rappeler que pour se faire élire Thatcher, par exemple, a été présentée comme une image d’un produit publicitaire. Idem pour le Brexit qui n’a été voté que grâce à une forte publicité qui a enfreint la loi, puisqu’on apprend que la campagne du vote est aujourd’hui sous enquête judiciaire. Le mensonge est dans leurs hautes sphères.

Le capitalisme a hérité de l’antiquité des pratiques malsaines. Il réserve à Darwin des pièges presque identiques à ceux réservés à Epicure. Cela nous rappelle que le capitalisme naturalise les injustices et la domination tout en les actualisant.

Si la littérature bourgeoise colle à Darwin la sélection naturelle, la limitant à l’élimination du plus faible, la féodalité colle à Epicure celle du jouisseur. Pour les discréditer, l’image de l’un doit rappeler la jouissance malsaine évidemment et le second l’image de la mort prématurée des plus faibles.

On constate que la discréditation du savant à une longue histoire. Epicure, ce philosophe grec que vous connaissez tous mais dont on nous fait oublier le génie, est le premier à anticiper le mouvement de l’atome sur plus de vingt-quatre siècles.

Les ennemis de ce savant grec avaient propagé que l’objectif principal était l’atteinte du bonheur par la satisfaction des seuls désirs naturels et nécessaires. En réalité, Epicure est surtout ce scientifique qui a imaginé l’atome vivant. Le mouvement imprévisible de l’atome était impensable en son temps et pendant longtemps, pour beaucoup de personnes, jusqu’à l’invention du microscope. Quant à dire que le mouvement est une prémices à la vie, c’est une autre paire de manches.

Nos scientifiques seraient-ils, à leur tour, d’un moindre niveau que leur peuple ? Le 5 janvier 2023, la presse rapporte des travaux de la première édition intitulée «The conférence» l’information suivante : des scientifiques algériens parlent de démocratiser les nouvelles technologies dans «le mode de gestion économique, culturel et social» et point de politique. Pourquoi l’intelligence artificielle resterait-elle en marge de la politique chez nos scientifiques ? Cette réduction, fait que le journaliste, entre autres, réponde toujours au juge et non au politique.

Convoquer un militant ou un journaliste en tant que journaliste au tribunal prouve que le problème relève de l’Etat, surtout quand son pouvoir dialogue avec un parti politique qui n’a jamais dénoncé le terrorisme.

S. K.