Les Marocains ahuris : le représentant d’Israël se rend à Marrakech avant le roi
Par Kamel M. – Pendant que les sinistrés de Marrakech et des régions environnantes attendaient Mohammed VI, quelle ne fut leur stupéfaction de voir l’ambassadeur d’Israël à Rabat débarquer sur les lieux du drame. De nombreux Marocains n’ont pas manqué d’exprimer leur haut-le-cœur et leur colère contre leurs dirigeants, Mohammed VI en tête. «Le représentant diplomatique de l’Etat d’Israël se rend à Marrakech avant le roi, avant le chef du gouvernement et avant les ministres du roi», s’est révolté l’opposant marocain Ali Lmrabet. «La prochaine fois, si un Etat étranger veut envoyer des aides au Maroc, il devra au préalable demander l’autorisation de David Govrin», s’est-il moqué.
Cette visite du diplomate israélien confirme les soupçons qui entourent l’affaire du refus de l’aide proposée par l’Algérie, après qu’un officiel marocain de haut rang, en l’occurrence le ministre de la Justice, avait affirmé que le Maroc y était favorable à condition que l’opération s’effectuât en coordination avec le ministère marocain des Affaires étrangères. Or, alors que trois gros porteurs de l’ANP attendaient sur le tarmac de l’aéroport militaire de Boufarik l’autorisation de décoller, la partie marocaine a signifié au consul général d’Algérie à Rabat que son pays déclinait l’offre algérienne. Que s’est-il passé entretemps ? De nombreux observateurs se disent persuadés que le refus est venu d’Israël, dont le gouvernement s’immisce de façon flagrante dans la gestion des affaires politiques, économiques, sociales et culturelles du Maroc, au grand dam de l’écrasante majorité des Marocains qui commencent à découvrir les méfaits de la normalisation sur eux.
En avril 2021, les images montrant une distribution d’aides à des Marocains démunis dans une synagogue avaient suscité un vent de révolte. Dans une vidéo tournée par les initiateurs de cette démarche controversée, on voyait des femmes se faisant remettre un couffin contenant des denrées alimentaires distribué par des Marocains de confession juive reconnaissables à leur kippa, à l’intérieur de ce lieu de culte juif, sous haute surveillance policière.
«La dignité des Marocains a été traînée dans la boue en exploitant leur pauvreté par ce qui est appelé le couffin du Ramadhan», s’insurgeait-on chez nos voisins de l’Ouest qui se rendaient compte, à l’époque déjà, que «l’humiliation, l’avilissement, l’instrumentalisation et l’opportunisme ont atteint des degrés jamais égalés». Pour eux, cette mise en scène cachait trois objectifs inavoués : «Détourner les regards du droit des Marocains à jouir pleinement des richesses de leur pays, cacher les desseins électoralistes et exploiter ces images avilissantes pour officialiser la normalisation avec Israël.»
Un an et demi plus tard, en juillet 2022, le régime marocain décalait une fête religieuse musulmane, l’Aïd, pour célébrer l’«indépendance» d’Israël à l’ambassade de ce pays à Rabat. Ce samedi-là, qui correspond au shabbat, c’est le puissant et inamovible octogénaire conseiller du roi qui avait représenté ce dernier à la cérémonie organisée par le chargé d’affaires à l’ambassade de l’entité sioniste dans la capitale marocaine. Ce dernier s’était félicité d’avoir «eu l’honneur d’organiser la 74e fête de l’indépendance de l’Etat d’Israël à Rabat» et d’avoir «reçu plusieurs personnalités éminentes au Maroc». David Govrin avait surtout salué la présence d’André Azoulay lors de cette rencontre qui «fut une cérémonie historique», à laquelle avaient pris part également, avait-on constaté, des représentants de pays du Golfe ayant normalisé avec le régime de Tel-Aviv.
La célébration de ce que les Israéliens appellent «indépendance» coïncide avec le 14 mai de chaque année, alors que cette date est considérée par les Palestiniens comme la «catastrophe» (nekba) car elle signifie l’exil forcé des Palestiniens de 1948 au lendemain de la proclamation de l’Etat hébreu. Mais, cela, le président du comité Al-Qods ne s’en soucie guère.
K. M.
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