Brahim Oumansour, chercheur à l’IRIS : «Le poids diplomatique de l’Algérie reste important au Sahel»
Par Nabil D. – «Alger fait face à plusieurs défis car la région et le monde ont beaucoup évolué et les nouvelles configurations sont marquées, notamment, par la montée de puissances régionales, avec une diplomatie plus agressive, plus active dans la région», a affirmé Brahim Oumansour, chercheur à l’Institut de relations internationales et stratégiques (IRIS), basé à Paris, en France. «La situation est tendue entre l’Occident et la Russie, et cela impacte directement les rapports qu’entretient Alger avec ses différents partenaires, que ce soit avec l’Union européenne ou avec les Russes et, plus largement, avec d’autres puissances régionales et internationales», a-t-il soutenu, dans un entretien à Radio France Internationale (RFI).
Confirmant que la relation entre Alger et certaines capitales de la région «est animée par la lutte hégémonique et le leadership régional» et que «cela met parfois la diplomatie algérienne en difficultés», l’auteur de L’Algérie, un rebond diplomatique a rappelé que la relation entre l’Algérie et les Emirats arabes unis «est aussi impactée par les nouvelles reconfigurations régionales». «Notamment, a-t-il développé, depuis la normalisation entre le Maroc et Israël, voulue par les Etats-Unis pour renforcer un axe entre les Etats-Unis, Israël, les Emirats arabes unis et le Maroc, pour agir sur tout l’axe Moyen-Orient et Maghreb». «Cela, bien évidemment, rajoute des défis supplémentaires à la diplomatie algérienne», a-t-il précisé.
Interrogé sur les inquiétudes exprimées par Alger en raison de l’insécurité qui règne dans plusieurs pays voisins – le Mali, le Niger, la Libye –, l’analyste a expliqué que l’instabilité régionale «fait partie de ces défis qui bouleversent, en quelque sorte, l’héritage de la politique étrangère algérienne qui a toujours été constante sur le principe de non-ingérence». Une inquiétude justifiée, selon lui, par «l’instabilité même de ses frontières, notamment sud, avec le Mali, le développement qu’on observe récemment avec le coup d’Etat et les nouveaux dirigeants maliens qui veulent résoudre la crise malienne par une solution militaire et une offensive militaire sur le Nord». Inquiétude justifiée également «avec l’arrivée d’acteurs étrangers à ses frontières», laquelle «se traduit, notamment cette année, par l’augmentation du budget militaire qui a plus que doublé». «Aujourd’hui, on sent chez les dirigeants algériens un sentiment d’encerclement par rapport à cette instabilité régionale», a-t-il appuyé.
«Le poids diplomatique de l’Algérie reste encore important au Sahel», a assuré le responsable de l’Observatoire du Maghreb, estimant que le fait qu’Alger continue à soutenir, y compris économiquement, certains pays du Sahel «contribue à renforcer les liens entre l’Algérie et ces pays». «Mais, bien évidemment, elle fait face à la concurrence, notamment de la politique africaine du voisin marocain et puis d’autres acteurs qui ont bouleversé la géopolitique africaine, en quelque sorte, et qui ont incité les Etats africains à diversifier leurs partenaires», a-t-il souligné. Une situation qui, a-t-il dit, «exige de la diplomatie algérienne beaucoup plus d’activisme et d’ingéniosité pour maintenir son poids, voire l’approfondir».
N. D.
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