Pour Biden et Trump : le juif est plus blanc que blanc et le Palestinien plus noir que noir
Une contribution de Saadeddine Kouidri – Dans le monde actuel dominent principalement le dollar, le Vatican, le Parti communiste chinois et la Russie de Poutine. On peut donc dire qu’il est multipolaire, tout en constatant, pour notre malheur, qu’aucun de ces pôles n’est africain. Dans son Discours sur le colonialisme, Aimé Césaire disait que si le chrétien bourgeois vilipende Hitler, c’est par manque de logique et qu’au fond, ce qu’il ne pardonne pas à Hitler, ce n’est pas le crime contre l’homme, c’est le crime contre l’homme blanc, et d’avoir appliqué à l’Europe des procédés colonialistes dont ne relevaient jusqu’ici que les Arabes d’Algérie, les coolies de l’Inde et les nègres d’Afrique.
Pour Hegel, la colonisation de peuplement permet d’organiser la déportation de pauvres qui encombrent les métropoles. Pour Hugo : «Au XIXe siècle, le Blanc a fait du Noir un homme» et pour Adam Smith : «De même que le profit que l’on tire de l’élevage du bétail dépend beaucoup de la gestion du bétail ; de même le profit tiré du travail des esclaves dépend de la bonne gestion de ces esclaves.» Ce genre d’opinion a dominé jusqu’à donner l’idée de la fondation de la science de la race. Par la suite, ceux qui citent ces savants se gardent bien de rappeler l’évolution de la sélection naturelle sa transformation, qui est celle de la sélection naturelle, par l’élimination du plus faible à sa protection, mettant à mal non seulement le créationnisme, mais aussi la loi du talion. Pour la politique dominante, la biologie naissante devait être ignorée pour ne pas porter préjudice à l’entreprise en cours qui ne pouvait réussir qu’amarrée au racisme. L’indigène, après l’esclave, fut sous pesé et analysé, dans les premiers laboratoires d’anthropologie pour sortir le produit estampillé «société civilisée et barbarie».
On sait pourquoi le siècle des Lumières remugle aujourd’hui. Raison à laquelle il faut ajouter celle des philosophes comme Voltaire, cet esclavagiste qui tirait profit de l’exploitation des plantations sucrières, ces premières usines du capital. Ils étaient dans la course au trésor et dans la recherche intellectuelle. Cette double fonction fait dire à Samir Amin que la domination culturelle de l’Occident ne tient pas à l’universalisme de ses valeurs. Elle ne s’est accomplie avec succès à l’échelle de la planète que parce qu’elle est attachée au projet mondial du capital.
Au XVe siècle, trois bulles papales vont légitimer la conquête de nouvelles terres, de leurs exploitations par l’asservissement des peuples africains puis américains, à la même année où le pape, les rois et les marchands réussissent à reprendre la main aux musulmans et à l’Orient, bannissant les Arabes, les Maures et les juifs d’Espagne, d’où partira Christophe Colomb à la conquête de nouvelles terres pour établir l’empire du Christ au-delà des mers.
Le capitalisme est un système politico-économique qui a comme base une production toujours plus grande de marchandises à des fins de profits. On attribue sa naissance au salariat et à la machine à vapeur, omettant cette première vérité qu’une marchandise naît, surtout, de l’extraction des ressources de la terre, la dépossession et l’extirpation de l’énergie humaine, contraintes par la violence coloniale, et qui a comme conséquence inhumaine la négation de la souveraineté des indigènes sur leurs corps.
En 1492, Colomb reçoit des Rois catholiques l’autorisation officielle d’équiper sa flotte pour la conquête de nouvelles terres. A la même date est annoncé le bannissement des juifs dans le but de les déposséder de leurs biens pour financer l’expédition. En cinq siècles, le capitalisme colonial extirpe l’énergie humaine aux indigènes, en passant par la Révolution industrielle, une étape cruciale de son histoire qui ne débutera qu’au XVIIIe siècle. L’Occident projette le monde dans le capitalisme de surveillance où l’expérience humaine est la matière première que fournit gratuitement la toile à des fins commerciales, tout en rehaussant le mercantilisme à son apogée. Elle fabrique des Soros plus riches que des Etats et prouve que l’entreprise privée et individuelle est une réussite, sauf que, pour cela, elle oblitère ses victimes innombrables au monde, et particulièrement aux yeux des électeurs. Et comme le dit René Depestre, si «depuis 1492 l’Occident n’a pas arrêté de mettre des masques sur les réalités», la plus saillante est celle-là.
Faut-il rappeler que lors de la guerre contre la Syrie, le Hamas s’était battu aux côtés d’Israël ? Après la victoire de la Syrie, le président Al-Assad reçoit Khalil Hayya, mais pas Khaled Mechal qui, lui, est resté dans la confrérie des Frères Musulmans.
On dit qu’Israël pourchasse et tue les membres du Hamas qui ont rejoint la résistance palestinienne et épargne les autres. Elle a assassiné à Beyrouth Saleh Al-Arouri, qui avait été expulsé du Qatar en raison de son opposition aux islamistes et qui n’adhère donc pas à leur projet néocolonial. Cet exemple est pour rappeler que les divisions chez les leaders palestiniens reflètent leur conviction à l’un ou l’autre des deux projets de société dont on ne parle pas assez. Peut-être par crainte de débattre de la liberté des Palestiniens et des Israéliens, qui ne peut être assurée que dans le projet d’un seul Etat binational et laïc et qui leur permettra d’échapper à la fois aux suprématistes blancs et aux royaumes arabes. Ce choix est évidemment aux mains des révolutionnaires palestiniens. L’Algérie fait beaucoup, et rien à la fois, si elle ne favorise pas l’aile révolutionnaire de la résistance.
Enfin, la première résolution du Conseil de sécurité de l’ONU, présentée par l’Algérie, exigeant un cessez-le-feu immédiat dans la bande de Gaza vient d’être votée. Avant que l’encre ne sèche, comme on dit, Antonio Guterres s’en inquiète de sa mise en œuvre et il écrit : «Un échec sera impardonnable.» S’il a raison de s’en inquiéter, il a tort de ne pas croire que l’échec est presque assuré car l’enjeu est la suprématie des hommes blancs, et Israël doit gagner tant que c’est Israël qui les représente depuis que le Noir palestinien les a mis à nu, le 7 octobre 2023.
La ministre sud-africaine des Affaires étrangères, Naledi Pandor, a déclaré que la Cour pénale internationale (CPI) aurait déjà dû émettre un mandat d’arrêt contre Netanyahou pour crimes de guerre commis contre les Palestiniens. L’offensive de la diplomate contre le premier représentant des suprématistes blancs devrait normalement être relayée par ceux qui projettent de reconnaître l’Etat palestinien, comme la Belgique, par exemple, avec Mme Hadja Lahbib.
Au résultat, deux Africaines, quoi que l’on puisse dire, éventuellement aider par leurs collègues de l’ONU, pourraient condamner le chef des génocidaires, ce suprématiste blanc-blanc, l’avorton du Ku-Klux Klan du Moyen-Orient et renforcer la lutte d’indépendance de la Palestine.
L’intense activité de Bliken ne cache-t-elle pas cette double guerre du Moyen-Orient ? Celle que mènent les Etats-Unis pour maintenir la région sous son joug et la guerre d’Israël pour accaparer toutes les terres palestiniennes. L’activisme de la diplomatie états-unienne n’est pas d’ajuster le timing de l’une et de l’autre en continuant à se servir du juif, comme de leur coutume, jusqu’à en faire un leurre et faire durer la guerre dans la région. Comme en Ukraine, ou pour le dire autrement : Biden et Natanyahou mènent une guerre avec des objectifs différents, souvent complémentaires.
Si Biden se sert d’Israël comme son pays s’est toujours servi des juifs, pour mener une guerre politico-stratégique, Netanyahou, ce raciste, provoque un holocauste en assassinant et en bombardant sans discontinuité les Palestiniens pour accaparer leurs terres.
S. K.
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