La singularité : ce bouclier occidental qui assure la protection au peuple juif
Une contribution de Saadeddine Kouidri – Durant des siècles, l’Occident est resté muet sur son génocide du peuple amérindien du Nouveau-Monde pour ne pas porter préjudice à son image de conquérant des contrées lointaines et permettre l’éternel recommencement de ses meurtres, de ses rapines, imposant la mort et l’ensauvagement à d’autres jusqu’à celui des Palestiniens pour faire de Gaza, cette ville millénaire, réduite à une bande pour en faire le projet d’un cercueil dont l’image est diffusée en live sur les écrans du monde.
Aujourd’hui, on désigne Netanyahou, comme hier on désignait Hitler, deux monstres qui vont servir à des millions de leurs semblables de «s’essuyer le couteau» sur leur dos pour déjouer l’histoire. Si Netanyahou semble intimider le monde comme Hitler l’aurait fait sans l’URSS au temps de Staline, il est à se demander si la faible présence de la Chine face à cet évènement tragique à Gaza n’est pas due à son Parti communiste qui maintient son économie dans celle du capitalisme.
Ce 23 août, Karim Khan, le procureur de la Cour pénale internationale, a confirmé que la Cour est compétente pour enquêter sur les sionistes. Pourquoi cette dernière précision après que tant d’eau eut coulé sous les ponts ? Il poursuit en demandant aux juges de prendre une décision urgente concernant l’émission de deux mandats d’arrêt contre Netanyahou et Galant. Ces deux sont des juifs et, en tant que tels, les Occidentaux, pour les protéger, les abordent avec complaisance. On conclut, avec cette précision, que la CPI subit l’influence de la singularité du peuple juif que les défenseurs de Netanyahou tentent de transférer au sionisme.
A la fin de son article, Christophe Courtin, publié ce 23 août un article intitulé «Guerre à Gaza : entre histoire et herméneutique, quelle place pour la vérité ?» prédit que «l’avenir d’Israël et des juifs passe par une lecture vivante de la Bible qui reconnaîtrait l‘histoire et les droits des Palestiniens». Christophe Courtin n’est ni prêtre ni théologien mais bien un spécialiste des droits de l’homme qui fait appel à l’explication du texte sacré dans le seul but est d’infléchir les décisions des organismes internationaux comme l’ONU, la CPI, la CIJ… qui prennent conscience d’une injustice qui n’a que trop durée.
Les intellectuels bourgeois viennent au secours de leur classe, y compris par la duperie. Leur texte est à 90% vrai et, avec le reste, ils infléchissent la vérité avec le but bien ancré qui est la consolidation du bouclier protecteur du juif. L’ONU, dès l’entame, leur a offert un Etat sur une terre spoliée aux Palestiniens. Pour taire cette dernière vérité, les sionistes fuient l’histoire et empruntent le chemin du Christ.
Dès 1958, dans un article publié dans la revue Esprit, intitulé «Perplexité sur Israël», Ricœur répondait à un Israélien qui défendait la singularité du peuple juif par une essence qui, seule, nommait «la figure réelle et permanente de l’Etat d’Israël» et qui avait ainsi un fondement géo-théologique : la terre promise de l’alliance mosaïque entre Dieu et le peuple juif. «Je peux comprendre cette essence, dit Paul Ricœur, par sympathie, par accord politique, par imagination, mais elle n’est pas mon essence.» Il ajoute plus loin : «Ce que nous disent les mythes, c’est ce qui ne peut nous être dit autrement» et nous renvoie illico presto à l’intertextualité. Une façon au philosophe d’embrouiller le présent par les textes anciens. Cet exemple, et vous en avez certainement d’autres en mémoire, utilise l’herméneutique chrétienne occidentale pour ressusciter en permanence la victimisation du juif.
Ils défendent leur cause par tous les moyens alors que chez nous, c’est l’inverse. Nous assistions comme des spectateurs à la vindicte générale d’un professeur de chez nous et par un étranger, intégriste de surcroît. Si le professeur Mohamed Arkoun fut vilipendé par Ghazali lors d’un séminaire en 1980 avec l’approbation de tous les théologiens présents, qu’est-ce qui empêche aujourd’hui l’autorité en la matière de faire un mea-culpa posthume au savant algérien ? L’université où enseignait ce Ghazali, El-Azhar, vient de reconnaître que le hidjab n’est pas une obligation en islam. Une interprétation erronée donc qui a entraîné des drames, des massacres en Algérie et qui, dans la société égyptienne, a accompagné la régression jusqu’à jeter son pouvoir dans les bras du sionisme.
Après la mort de Kateb Yacine en octobre 1989, ce théologien égyptien écrit tout une lettre intitulée «Contre Kateb Yacine» pour dire : «Cet homme est trop bas pour que j’en parle.» Ce mépris sur l’un de nos meilleurs romanciers donne une idée de ses prêches clamés tous les vendredis sur les écrans de la télévision nationale. Je ne connais toujours pas de condamnation officielle à cet affront
Pour défendre la Palestine, il faut commencer par reconnaître nos fautes, nos lâchetés qui alimentent le sionisme, et l’obscurantisme à l’aide d’exemples concrets comme celui de Ghazali en affirmant que Mohamed Arkoun avait raison sur ce dernier et que tous les séminaristes avaient tort.
Nous constatons chaque jour que la technologie occidentale mise au service d’Israël est piégée par sa barbarie tandis que le dénuement des Palestiniens est couvert par l’amour de la patrie.
S’il y a des dizaines de morts palestiniens chaque jour, les Israéliens n’en sortent pas indemnes pour autant. On apprend qu’ils ont de plus en plus peur, leur existence devient précaire, leur armée n’est plus invincible, leur service secret est faillible et leur extrême droite le dénonce sur les plateaux de télévision pour exiger plus de morts palestiniens, plus de guerre avec les Arabes et les musulmans et, surtout, avec l’Iran. Pour les dissuader, Hezbollah, ce 25 août, détruit leur principale base de renseignement militaire, non loin de Tel-Aviv, au moment où la résistance héroïque des Palestiniens porte davantage de coup à l’armée coloniale. Pour détourner l’opinion des critiques sur l’insécurité grandissante en Israël, Ben Gvir, ministre de la Sécurité nationale, annonce le projet de construction d’une synagogue sur l’esplanade des mosquées.
Les chrétiens évangélistes états-uniens et les juifs ont en commun la croyance du retour du Christ à Jérusalem. C’est ce facteur d’union qui fait la force de l’IPAG, ce puissant lobby auprès du Congrès états-unien qui se permet, quand cela l’arrange, de mettre les résolutions et les lois internationales en stand-by avec l’approbation de tous les Occidentaux, à de rares exceptions, jusqu’à faire dire au secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, que «l’ordre mondial actuel ne fonctionne pas».
La lutte contre le colonialisme est dans la récupération de la terre, elle ne se fait pas au nom d’une religion ou de toute autre idéologie mais par amour du pays. On en est là dans les colonies, et on ne peut résister et vaincre qu’avec une conscience politique élevée. Faire croire aux jeunes Algériens que notre libération s’est faite au nom de la religion ou que la France nous a donné l’indépendance a ouvert la porte aux charlatans comme Ghazali, qui a finalisé la décennie sanglante, sans parvenir à nous jeter dans les bras du sionisme, cet «occidental» qu’il condamnait bêtement puisqu’il a contribué à leur livrer son propre pays mais pas le nôtre, grâce aux patriotes et à l’Armée héritière de l’ALN et non d’une révolution de palais.
«Comme tous les nationalismes, et bien plus intensément encore, le sionisme considère le passé historique à la lumière du présent», écrit Abraham Léon, disparu à Auschwitz en 1944, à 26 ans. Juif, résistant à l’occupation nazie, il rédige entre 1940 et 1942 le livre intitulé Conception matérialiste de la question juive, où il est écrit que «le sionisme est un mouvement très jeune ; c’est le plus jeune des mouvements nationaux européens. Cela ne l’empêche pas de prétendre, bien plus que tous les autres nationalismes, qu’il tire sa substance d’un passé extrêmement lointain… Il considère le passé historique à la lumière du présent.» Fin de citation. Tout cela pour perpétuer la victimisation du juif et accuser l’autre, tous les autres, qui ne lui trouvent aucune singularité, malgré ses simagrées. Deux exemples pour illustrer : les mots antisémite et Shoah. Le sionisme fait croire que seul le juif est sémite, et que la Shoah est spécifique au génocide des juifs par Hitler. Celui qui n’est pas juif et qui parle de la Shoah ou qui l’assimile tout simplement à un génocide, en général, est un anti-juif synonyme d’antisémite. Mélenchon vient d’en faire les frais, et nous savons qu’en vérité c’est parce que ce dernier respecte les résolutions de l’ONU sur la Palestine que Macron et ses sbires lui dénient la victoire électorale en le disqualifiant du poste de Premier ministre de la France. C’est ce qu’on peut qualifier de coup d’Etat de la bourgeoisie française impérialo-sioniste.
S. K.
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