Le très long terme
Par Bachir Medjahed – Qui des hommes politiques, des économistes ou des fonctionnaires possède la décision comme, par exemple, de confier un projet important à une entreprise privée nationale au nom de la préférence nationale plutôt qu’à une entreprise étrangère ? Qui a assez de légitimité pour décider de l’avenir, sachant le risque de ne pas voir loin et donc de gaspiller le «choix» des futures générations ?
C’est apparemment la classe politique et non la classe constituée par les professionnels de l’économie qui possède le pouvoir d’engager l’avenir et même de décider des règles du jeu économique sans rien mettre en débat.
Maintenant, il est connu qu’aucun itinéraire proposé ne pourra être emprunté sans la mobilisation de toutes les forces disponibles. Quels objectifs à la fois politiques et économiques d’intérêt général pourraient être atteints ? De quelle légitimité pourrait se prévaloir tout gouvernement pour plomber l’avenir des futures générations en engageant des politiques qui pourraient impliquer des trajectoires politiques et économiques sur un horizon de très long terme dont personne ne peut en cerner les contours ? Déjà qu’il est difficile, dans les temps présents, de se prévaloir d’un consensus pour légitimer toutes les décisions qui n’engagent pourtant que le moyen terme.
Que faudrait-il, en termes de consensus, pour engager le futur des générations à venir ? La question se pose davantage qu’il n’y a aucune prise sur l’évaluation des ressources financières futures. C’est elle qui modifie les règles du jeu économique depuis qu’il est apparu qu’il ne faudrait plus compter sur les investissements étrangers et les privatisations, les deux en termes de quantité et de qualité.
Modifier les règles du jeu dans quel sens, pourquoi et qui pense avoir une légitimité éternelle, valable pour une durée qui va très au-delà des mandats temporaires pour prendre des engagements de très long terme au nom des futures générations ? La question se pose également davantage qu’il n’y a plus aucune étude de prospective, même sur un horizon de dix années, qui nous décrirait l’environnement international et régional plus particulièrement dans lequel notre pays va évoluer, ce que nous avons décidé comme programme sur les dix années à venir et les retombées de ce programme.
Il faut bien se rendre compte que l’économie qui dépend d’une ressource volatile ne peut être régulée. Il faut bien également se rendre compte qu’avec cette obsession à définir et à quantifier les programmes par référence à une variable aléatoire, tout l’avenir s’inscrit dans une large marge d’incertitudes avec l’impossibilité d’une redistribution sociale.
B. M.
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