«Printemps arabe» : le Qatar joue et gagne
Tous les indices économiques des pays qui ont connu un changement de régime dans la foulée du «printemps arabe» affichent aujourd’hui une tendance à la récession et à la faillite. Une aubaine pour les investisseurs qataris qui, en prédateurs, s’emparent des secteurs les plus juteux dans ces pays où le petit émirat du Golfe garde une mainmise politique indiscutable. En Egypte, par exemple, l’incursion du Groupe qatari QNB s’assimile à une véritable OPA sur le système financier local, au vu des parts qu’il ambitionne d’acheter dans la principale banque privée, la National Société Générale Bank (NSGB), avec ses 160 filiales et ses 4 500 employés. Dans un communiqué daté du 28 mars, QNB annonce avoir finalisé l’opération de prise de parts, de l’ordre 97,12 %, dans la banque égyptienne. Cette prise porte sur l’ensemble des actions de Société Générale, soit 77,17%, en plus des 19,95% acquis auprès des actionnaires. Grâce à cette nouvelle conquête inespérée, QNB aspire à devenir ainsi le label bancaire numéro un dans la région du Moyen-Orient et d’Afrique d’ici 2017. Cela se passe au moment où l’Egypte sollicite le FMI pour un financement de l’ordre de 4,8 milliards de dollars pour faire face à une situation plus qu’alarmante, aggravée par des troubles politiques endémiques. Une délégation de l’institution mondiale est d’ailleurs attendue le 1er avril prochain pour des négociations avec le gouvernement Qendil. Le Groupe qatari connaît une expansion exceptionnelle à l’internationale, à la faveur des chamboulements politiques survenus dans certains pays arabes, avec une hausse record des avoirs depuis 2011, atteignant 367 milliards de rials. Il gère désormais 400 succursales et bureaux de représentation à travers 25 pays et a renforcé son implantation avec des prises de part dans divers établissements financiers : 35% à la Banque jordanienne de construction, de commerce et de financement, 40% à la Banque commerciale internationale dont le siège est aux Emirats arabes unis, mais aussi en Irak et en Indénésie, cela pour dire l’étendue de cette implantation. En Tunisie, le gouvernement d’Ennahda éprouve les pires difficultés pour satisfaire les besoins vitaux d’une population qui subit les contrecoups de la «révolution», avec la flambée des prix des produits de première nécessité et du carburant, sans compter la multiplication des grèves dans différents secteurs. A telle enseigne que même les banques n’arrivent plus à satisfaire les demandes de crédits de consommation, estimées à quelque 10 milliards de dinars (6,5 milliards de dollars), l’équivalent du tiers du budget de l’Etat, et frôlent la banqueroute. Insolvabilité des banques, due à une politique populiste qui a suivi la chute de l’ancien régime, arrêt des investissements, insécurité, absence de stratégie d’étude des risques financiers, autant de facteurs qui aggravent davantage le cas de ces banques, qui n’attendent qu’un preneur pour les «sauver» d’un banqueroute fatale.
R. Mahmoudi
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