Benflis : «Le changement au sein de l’ANP est un leurre»
Le président du parti Talaie El-Houriyet n’y est pas allé avec le dos de la cuillère pour décrire la situation politique actuelle. Intervenant à l’occasion de l’installation du secrétariat national du parti, Ali Benflis a estimé que la fraude, qui «a gangrené notre système politique», en est «la marque honteuse» et «révèle abondamment le peu d’éthique politique sur lequel il repose». Pour l’ancien candidat aux présidentielles de 2004 et 2014, si la fraude «peut fausser des scrutins, détourner la volonté citoyenne et confisquer le choix populaire», elle «ne peut jamais entamer la détermination de ceux qui se battent pour un changement démocratique, pour l’Etat de droit et pour une société des libertés». Benflis note que son parti «arrive dans le paysage politique national à un moment où, de toutes parts, des crises les unes plus complexes que les autres assaillent» l’Algérie. «Notre pays, a-t-il dit, vit une crise de régime dans laquelle la vacance du pouvoir constitue le point nodal», estimant que cette vacance du pouvoir «prive le pays du chef et du centre de décision unique dont il a besoin en ces temps de multiplication des enjeux et des défis». Pour Benflis, cette vacance «met les institutions et l’administration publique en situation de quasi-cessation d’activités» et «crée un vide que des forces extra-constitutionnelles s’empressent de combler en s’emparant, du même coup, du centre de la décision nationale qu’elles s’emploient à mettre au service d’intérêts particuliers au détriment de l’intérêt général et de l’intérêt national lui-même». Faisant allusion aux derniers changements opérés au sein de l’armée et des services de sécurité, Ali Benflis a qualifié cette démarche de «début d’épuration politique» qui «n’est pas le signe d’un pouvoir politique sûr de lui-même, confiant en ses capacités et n’ayant rien à craindre quant à ses choix et à ses décisions», mais «le signe d’un pouvoir saisi de panique, qui se raidit et perd son sang-froid». Pour l’ancien chef de gouvernement de Bouteflika, «s’obstiner à vouloir faire passer les changements intervenus dans le haut commandement de l’ANP pour une restructuration alors que tout le monde a pu constater qu’il ne s’agissait que d’un transfert de prérogatives d’un commandement à un autre, relève d’un leurre politique dont personne n’est dupe». Il estime que «présenter ces changements comme s’inscrivant dans le cadre de réformes politiques plus vastes, participe d’une véritable entreprise de mystification tant chacun sait que l’obsession du régime politique, en ces moments, n’est pas dans le changement, mais dans la survie et qu’il n’a pas l’esprit aux réformes, mais à la préservation du statu quo à tout prix». Ali Benflis est convaincu que la crise du régime et la crise économique graves «destinent notre pays à aller au-devant de sérieuses incertitudes sociales», prédisant au pays une expansion du chômage, une érosion du pouvoir d’achat, un rétrécissement de l’offre sociale et une perte de valeur du dinar dus à la chute de la dépense publique, conséquence de la chute des prix du pétrole.
Karim Bouali