Souverains dites-vous ?
La lecture du long communiqué de l’Association algérienne de lutte contre la corruption (AACC), dont nous rendons compte par ailleurs, est édifiante quant aux limites atteintes par les souverainetés nationales (certaines «souverainetés nationales», serions-nous tentés de préciser, parce qu’il y en a qui sont intouchables, en Amérique latine, par exemple). L’ambassade américaine a pratiquement convoqué (invité, par euphémisme) l’AACC, et son porte-parole y est allé pour faire ce que l’on ne peut éviter d’appeler un rapport sur la corruption en Algérie. Le plus intéressant est dans les échos que le communiqué renvoie et qui laissent deviner le point de vue des Américains. En fait, il n’y en a qu’un et il concerne Amar Ghoul. On apprend ainsi que les Etats-Unis cherchent à savoir si Amar Ghoul est impliqué dans les affaires de corruption. Evidemment, a répondu Djilali Hadjadj. Le scoop n’est pas dans la réponse du porte-parole de l’AACC mais plutôt dans la question de la diplomate américaine qui s’est intéressée au ministre des Travaux publics. Une ingérence en cache une autre. Enquêter sur la corruption dans un pays souverain et à partir de son propre sol et auprès d’une association nationale sert aussi à prospecter de futurs dirigeants pour ce pays. Amar Ghoul n’est pas connu pour être un islamiste radical, il est classé modéré et fait tout pour confirmer cette idée. Le dernier gage en date qu’il a donné a consisté à se désolidariser de sa branche politique d’origine, le MSP, pour créer un parti politique qu’il tente de présenter comme non islamiste. Il est resté dans le gouvernement pour montrer une prétendue stature d’homme d’Etat. Bref, la question sur Amar Ghoul n’est pas innocente. Il faut surtout admirer la naïveté du porte-parole de l’AACC qui sollicite Obama pour intervenir afin que la réglementation internationale ne permette plus au gouvernement algérien d’opposer un veto à la participation de la société civile aux réunions de la Convention des Nations unies sur la corruption. Et où se tiendra la prochaine réunion ? Au Panama, le pays de la corruption endémique.
Kamel Moulfi
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