La paranoïa puritaine islamiste ou l’infâme cabale contre l’islam des lumières
Par Nasser S. – Pourtant, le président Al-Sissi ne cesse de dénoncer la violence interreligieuse tout en appelant à renouveler le discours et à promouvoir un islam d’ouverture. Les médias accusent aussi Al-Azhar (très vieille mosquée et Institution) de ne pas se positionner clairement contrer le «jihadisme» en ne réalisant pas qu’ils font dans le «salafisme» – qui semble dominer aussi bien cette institution que l’espace politique – hostile à tout changement dans le discours et l’interprétation, suivant leur logique, que l’ancien est plus sain et donc plus véridique ! Il a fallu que des intellectuels sortent des sentiers battus, avec une autre vision émancipatrice souvent à contre-courant de la doxa, pour que la vieille garde sorte de sa léthargie pour contrer ce qu’ils appellent la «diffamation de l’islam», voire les tentatives «déviationnistes» ou «falsificatrices» ! Rien que ça !
C’est le prix que paie un diplômé de l’Université d’Al-Azhar, la plus haute autorité religieuse d’Egypte, pour avoir émis des avis religieux «révolutionnaires» dans la compréhension de l’islam authentique. Il n’a cessé, avec intelligence, sagesse et respect, de démontrer et de prouver, devant les télés, les faussetés et les dissimulations de la plupart des «vérités» que l’on enseigne depuis des siècles, anéantissant beaucoup de thèses qui étaient considérées comme immuables, mettant dans un grand embarras la caste des «Oulémas» (savants religieux) qui n’arrivaient presque plus à le contredire ou le contrer malgré des «face à face» souvent houleux dont il sort à chaque fois convainquant ! Toutes les tentatives de le discréditer et de le faire taire sur la «réforme» du discours religieux ont échoué !
Il est mis en prison pour cinq années, pour un seul chef d’accusation, suite à neuf plaintes : avoir affirmé qu’une lecture intelligente et analytique du Coran ne permet pas de conclure qu’il faut «couper la main» du voleur, mais de couper le «lien» qui l’a poussé au vol ! … Etrangement, au même moment où l’on condamne un voleur pour… de la prison.
Ce jeune «azhariste» a, en effet, provoqué la panique dans les milieux conservateurs ainsi qu’à Al-Azhar, remettant en cause tout ce qui a été dit ou imputé à tort à l’islam ou au Prophète depuis quatorze siècles. Le «hidjab» qui, finalement, a été reconnu par Al-Azhar comme n’étant pas une obligation islamique ; la loi de l’apostasie qui permet de tuer l’apostat ; l’hostilité envers les minorités religieuses ; la «jizya» le tribut des minorités religieuses ; les relations avec les non-musulmans, la remise en cause de dizaines de hadiths d’Al-Boukhari, opposition aux idées et enseignements d’Ibn Taymyia, entre autres, le «père spirituel» des terroristes islamistes actuels etc. Il va jusqu’à affirmer que Daech et assimilés sont des sous-produits des programmes d’Al-Azhar.
Il n’est pas le seul : un certain Islam Behery, aussi déterminé que lui, avait aussi fait de la prison mais a bénéficié d’une grâce présidentielle en fin de peine. Son interdiction de continuer à s’exprimer devant les télés, comme sollicité, n’a pas été retenue.
Un autre cheikh, Mustafa Mohamed Rached, un éminent professeur de la Charia et du droit islamique, après avoir soutenu un doctorat en Egypte (avec mention excellent), a eu des problèmes pour ses avis religieux progressistes et avoir asséné que «la lecture du Coran faite par des abrutis n’engage que les abrutis» ! Très vite la paranoïa puritaine des islamistes et leurs soutiens ont tenté de briser la vie et la carrière de cet universitaire en lui accolant une pure invention : sa conversion au christianisme, tout en lui retirant sa nationalité, sans passer par la justice ! Pure calomnie ! Depuis l’Australie, il n’arrête pas de se battre pour dénoncer l’infâme cabale et recouvrer ses droits de citoyen égyptien.
Malgré une volonté de changement en haut lieu, le parcours pour un islam des lumières reste encore plein d’embûches.
N. S.
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