Dossier – Nouveau siège d’Air Algérie : du bricolage pour un projet qui coûte 80 millions d’euros (V)
Le projet de construction du nouveau siège d’Air Algérie a pris une tournure inattendue. Après trois ans de travaux, le chantier, sorti à peine de terre, est aujourd’hui totalement à l’arrêt. Ce projet de 80 millions d’euros n’est qu’une carcasse qui se dégrade au fil des jours en raison du bricolage dont ont fait preuve les responsables chargés du dossier. Un conflit oppose actuellement l’entreprise réalisatrice et le maître d’ouvrage pour non-respect des termes du contrat. Une procédure en arbitrage international a été engagée par le constructeur. Non seulement le siège n’a pas été construit, mais Air Algérie risque gros pour des problèmes d’ordre contractuel. Les responsables en charge du dossier ne faisaient qu’à leur tête, ne tenant pas compte des termes du contrat et changeant d’avis constamment. Ainsi, le maître d’ouvrage a supprimé l'essentiel des conditions qui protègent les intérêts de l'entreprise réalisatrice. Dans le contrat signé avec le constructeur, il est stipulé qu’en plus d'une garantie bancaire de bonne exécution de 10%, le maître d’ouvrage, à savoir Air Algérie, peut opérer une retenue sur tous les paiements de 5%, alors que ces clauses sont contraires aux dispositions du code des marchés publics. Ce texte réglementaire institue la mise en place d’une garantie de bonne exécution de 10% ou bien d’une retenue de 10%. Excellant dans l’improvisation, les responsables du dossier à Air Algérie décident de plusieurs modifications intempestives des plans, ce qui implique d’importances incidences financières par rapport à ce qui a été prévu initialement : 700 millions de dinars pour l’électromécanique, 200 millions pour le désenfumage et 200 millions pour le carrelage, les cloisons… Au plan opérationnel, rien n'est définitif et rien n'est validé ni par le maître d'œuvre ni par le maître d'ouvrage. Cela laisse la voie ouverte à toute autre modification majeure au fur et à mesure que le projet avance. Le projet n’était pas bien ficelé (étude du sol, topographie, génie civil et architecture) avant le lancement des travaux. De graves lacunes qui se sont répercutées négativement sur la réalisation de ce projet et qui hypothèquent la construction de ce nouveau siège de la compagnie nationale. Le constructeur a suspendu les travaux qui sont arrivés au 4e étage avec trois niveaux de sous-sols sur 35 000 m2. Evoquant le non-respect des clauses du contrat par Air Algérie, il réclame près de 100 millions d’euros de dommages et intérêts. Si l’entreprise réalisatrice obtient gain de cause, les finances d’Air Algérie vont prendre un sérieux coup. Ainsi, un projet de 83 millions d’euros risque de coûter 200 millions d’euros.
Hani Abdi