Bouteflika rend hommage à la dynastie marocaine et ignore les héros du Congrès de la Soummam

Dans son message à l’occasion de la Journée du moudjahid, le chef de l’Etat a longuement rendu hommage au roi du Maroc, Mohammed V, qualifié de «vaillant moudjahid», et son fils Hassan II, ainsi qu’aux leaders tunisiens de l’époque, sans avoir, à aucun moment, cité les noms des architectes du Congrès de la Soummam, ni ceux des héros de l’offensive du 20 août 1955. Qu’on en juge. D’entrée, le président de la République choisit son angle d’attaque pour évoquer cette journée du 20 août, diluée dans plusieurs dates pour être finalement sortie de son contexte fondamental : «(…) Aussi, je saisis cette opportunité pour dire, au nom du peuple algérien, l'attachement de l'Algérie au projet d’édification du Maghreb arabe par fidélité aux nobles valeurs de justice, de liberté, d'unité et de progrès commun qui nous ont unis durant notre lutte contre le colonialisme». Pour Bouteflika, il y a à l’origine le 20 août de l'année 1953, où «le peuple algérien a joint sa voix à celle du peuple marocain frère pour dénoncer le protectorat et les forces d'occupation qui ont contraint à l’exil son éminent souverain, le vaillant moudjahid Mohammed Ben Youssef, le roi Mohammed V, lui et sa famille, y compris le prince héritier de l'époque, Hassan II, que Dieu les accueille en Son vaste paradis parmi les pieux». Pour lui, les «plus beaux actes d'héroïsme» sont ceux qui ont «permis le retour du roi Mohammed V dans sa patrie, concrétisant le triomphe de la révolution du roi et du peuple, mais aussi le retour victorieux, dans son pays, du leader Bourguiba». Encore : «Le 20 août, c’est aussi le symbole de la solidarité de notre valeureux peuple avec ses frères dans le royaume du Maroc». Tout le reste du message est une suite d’évocations rhétoriques de la lutte du peuple algérien aux côtés des «peuples frères» contre le colonialisme, et d’hommages à ces moudjahidine anonymes, dont «les exploits et les actions héroïques resteront éternels et continueront à jamais de favoriser l'éveil des consciences, la mobilisation des énergies et l'exaltation des principes d'abnégation et de don de soi». Ainsi, aucune allusion au Congrès de la Soummam qui a donné à la Révolution de Novembre une plateforme politique et des structures modernes, ni à ses artisans, Abane Ramdane, Larbi Ben M’hidi, Krim Belkacem et tous les autres, dont la plupart sont morts au combat et, à ce titre, méritent un hommage particulier. Comment ignorer, à cette occasion, Zighout Youcef, acteur principal du 20 août 1955, l’offensive du Nord-Constantinois, et du 20 août 1956, les assises de la Révolution ? L’Algérie officielle célèbre-t-elle ces anniversaires historiques pour en occulter l’essence et en travestir le message ?
R. Mahmoudi

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