Tout finit par se savoir
Par Kamel Moulfi – Ce serait donc la faute aux journalistes, ces monteurs de cabales, si des ministres ou de hautes personnalités politiques se retrouvent au centre d’affaires scandaleuses. Ainsi, sous couvert de remplir leur mission qui est d’informer les citoyens et, aussi – comme c’est leur droit –, de commenter les faits et de critiquer des comportements, ils inventeraient plutôt des histoires de toutes pièces, juste pour nuire à des gens ou pour satisfaire le désir du public de savourer les côtés racoleurs des événements. En quelques mots, les journalistes abuseraient de la liberté d’expression et de la liberté de la presse indispensables à l’information du public. On l’aura compris ; il s’agit du reproche, voire de l’accusation portée contre les journalistes d’avoir fabriqué le dossier Chakib Khelil, du nom de l’ex-ministre de l’Energie. On peut noter qu’au moment où ils écrivaient sur cette affaire, ils n’ont pas été «rappelés à l’ordre» comme l’exige la déontologie en cas d’écart par rapport aux fondamentaux du métier. Aujourd’hui, au lieu de vérifier les faits, on s’en prend aux journalistes qui les ont rapportés. Dans tous les cas, le lectorat de la presse privée comme les téléspectateurs des chaînes algériennes privées ont rarement été dupes. Ils soupçonnent de longue date que les affaires qui sont jetées en pâture à l’opinion publique tiennent plus souvent de batailles entre clans du pouvoir, par médias interposés, que de résultats d’investigations journalistiques, sérieuses et poussées, qui sont, par ailleurs, pleines de dangers, connaissant la nature des enjeux et les capacités de nuisance des protagonistes de ces affaires. Encore faut-il que les journalistes aient accès aux sources d’information et qu’ils soient prémunis contre les manipulations, car le public, s’il veut la vérité, manifeste en même temps un engouement prononcé pour les scandales. Il est bien servi. C’est l’ère des «lanceurs d’alerte» qui ignorent les frontières, les pouvoirs locaux et les législations nationales. Tout finit par se savoir.
K. M.
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