Un nostalgique de «l’Algérie française» à la rescousse du régime de Rabat
L’opération qui était censée «diaboliser» le Front Polisario à travers la projection du «film documentaire» intitulé Sahara et Sahel Connexions – trafic, drogue, terrorisme au Parlement européen à Bruxelles, le 26 avril 2017, film coréalisé par les agents des services marocains, la DGED, Latifa Aït Baala et le «réalisateur» Hassan El-Bouharrouti, secondés par le transfuge du parti de Marine Le Pen, l’eurodéputé Aymeric Chauprade, s’est avérée un véritable flop. Le documentaire en question avait pour objectif d’alimenter les spéculations fantaisistes et d’entretenir la confusion, en faisant le parallèle éhonté entre le mouvement de libération le Front Polisario et des organisations terroristes qui écument la région du Sahel.
Les dérobades de Louis Michel et Gilles Pargneaux
Premier couac, l’eurodéputé et ancien commissaire européen Louis Michel, parrain de cet événement, s’est dérobé à la dernière minute en abandonnant ses «compagnons» en rase campagne. Louis Michel n’est pas à son premier faux bond puisqu’il a abandonné de la même manière ces mêmes «acteurs» l’année dernière à l’occasion de la projection d’un autre documentaire de propagande intitulé Sahara Occidental – source et ressources au Parlement européen, en avril 2016, du même incorrigible réalisateur marocain Hassan El-Bouharrouti.
Ayant certainement pris la mesure de la gravité de cette nouvelle manipulation, après la mobilisation de ses collègues parlementaires, qui ont saisi le président du Parlement européen pour attirer son attention sur «l’irresponsabilité» que constitue une telle action de «propagande» qui «n’a pas sa place» au sein de l’hémicycle européen, Louis Michel a préféré sécher cette rencontre. Le président du Parlement européen a, d’ailleurs, tenu à clarifier, sans appel, la position de l’institution qu’il dirige, en précisant dans une correspondance qu’il a adressée à ses pairs parlementaires que «de tels événements, même s’ils se déroulent dans les locaux du Parlement, ne représentent pas la position officielle du Parlement qui s’exprime par ses résolutions plénières ou par l’intermédiaire de ses organes parlementaires officiels respectifs».
Par ailleurs, il y a lieu de relever que les organisateurs ont dû se résoudre contre leur gré à modifier la fiche de présentation de cette mascarade, en supprimant la référence au Front Polisario, qui y figurait sur la fiche d’origine aux côtés d’organisations terroristes, à l’instar d’Aqmi et du Mujao. Il n’en demeure pas moins que le «film» en lui-même, dont les «acteurs vedettes» les plus en vue ne sont autres que Aymeric Chauprade, présenté comme un spécialiste en géopolitique, et le directeur du Bureau central d’investigations judiciaires (BCIJ), Abdelhak El-Khiame, est une entreprise de propagande à la gloire des thèses marocaines les plus insensées. A titre d’exemple, le film revient sur le trafic de drogue dans la région en provenance d’Amérique latine, en faisant fi du fait que le Maroc reste l’un des plus grands pourvoyeurs mondiaux en la matière, dont la culture du cannabis est carrément institutionnalisée dans les différentes régions du royaume, le Rif en particulier. Le documentaire a également passé sous silence les accointances aujourd’hui avérées du Makhzen avec le Mujao.
Deuxième couac, aucun autre eurodéputé sur les 751 que compte l’hémicycle européen n’a daigné faire le déplacement pour assister à cette projection, y compris «l’ami fidèle du Makhzen», le dénommé Gilles Pargneaux. Il faut dire que ce dernier, «eurodéputé socialiste français», s’est bien gardé de partager l’affiche avec son compatriote et néanmoins xénophobe Aymeric Chauprade, qui aurait mieux fait, d’ailleurs, de se pencher sur le cas de ses centaines de compatriotes résidant au Maroc, «le havre de paix», qui ont voté pour Marine Le Pen au premier tour de l’élection présidentielle française. Il faut dire aussi que la concurrence que se livrent ces deux pantins sur le terrain de l’allégeance honteuse au Makhzen, jusqu’ici chasse gardée de l’eurodéputé socialiste, est sans commune mesure.
Des invités à la solde du Makhzen
Devant une salle «remplie» quasi exclusivement de personnes issues de la communauté marocaine établie en Belgique, et même en Italie, et outre le «maître de cérémonie», le xénophobe et adepte du choc des civilisations, Aymeric Chauprade, les organisateurs ont fait appel à des «panelistes» dont le parti pris pour les thèses colonialistes marocaines n’est un secret pour personne. L’un d’eux est le Français Jean Guion, président de l’alliance francophone, chantre de la Françafrique reconverti en «conseiller diplomatique» auprès de certains chefs d’Etat africains, dont le président burkinabè Blaise Compaoré. Jean Guion est, d’ailleurs, affublé du sobriquet de «griot» du président burkinabè. Le second paneliste venu faire les louanges du Makhzen est Bertin Mampaka, sénateur belge d’origine congolaise.
Ce dernier n’a pas caché sa nostalgie de l’ère «Muboto» qui a régné en maître incontesté pendant des décennies sur l’ex-Zaïre pour finir exilé à Rabat, où il est enterré, après avoir été accueilli à bras ouverts par le roi Hassan II pour services rendus. Le sénateur belge s’est dit fier que son pays d’origine comptait parmi les rares pays qui s’étaient montrés solidaires avec le Maroc lorsque ce dernier a décidé de quitter tambour battant la défunte OUA en 1984, pour le résultat que l’on sait, plus de 30 ans après, en revenant siéger comme 55e Etat de l’Union africaine, aux côtés de la RASD. Ce que ce personnage a omis peut-être de rappeler, c’est qu’il aimait aussi se rendre dans la Libye de Kadhafi, à l’occasion notamment de rencontres et forums réunissant la diaspora africaine organisées par Kadhafi, lequel est présenté dans le «film-documentaire» comme l’un des personnages responsables du conflit au Sahara Occidental en ayant fait partie des contributeurs à la création et à l’armement du Front Polisario dans les années 1970.
Par ailleurs, les coréalisateurs n’ont éprouvé aucune gêne à surfer sur la souffrance et la douleur encore vivaces d’ex-otages, en tentant de discréditer le Front Polisario, sans succès. Il faut dire que surfer sur la douleur des autres est devenu un sport national au Maroc et une méthode rodée, en témoigne le chantage que tente d’exécrer le royaume sur l’Union européenne s’agissant de la question migratoire, ou encore, plus récente, la tentative avortée de faire porter le chapeau à l’Algérie sur la question des réfugiés syriens refoulés du Maroc vers la frontière algérienne.
Chauprade et sa haine de l’Algérie
Il est intéressant de rappeler qu’Aymeric Chauprade, issu de la famille idéologique haineuse de «l’Algérie française», ne rate aucune occasion au sein du Parlement européen, obéissant à l’agenda que lui dicte le Makhzen, pour tenter de nuire à l’Algérie, mais peine perdue. Le dernier acte en date est le rejet par la Commission des Affaires étrangères du Parlement européen, en novembre 2016, de deux amendements hostiles à l’Algérie. Des amendements recyclant les vieilles thèses marocaines sur la «persécution des minorités» en Algérie et sur la «violation des droits de l’Homme» dans les camps de réfugiés sahraouis à Tindouf qu’il a tenté d’introduire désespérément dans le «rapport annuel sur les droits de l’Homme et la démocratie dans le monde en 2015, et sur la politique de l’Union européenne en la matière».
Visiblement, le Makhzen, qui fait feu de tout bois et ne sachant plus à quel saint se vouer, est allé jusqu’à passer un pacte avec le diable, en faisant appel aux services de cet eurodéputé islamophobe et adepte des thèses colonialistes-spoliatrices les plus rétrogrades. Décidément, «le colonialisme est un mauvais élève !» comme le clamait haut et fort le héros de Diên Biên Phu, le général Vo Nguyen Giap, lors de sa visite à Alger durant les années 1970.
Karim B.
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