Moscovici : le recouvrement des droits de douanes par le Sahara Occidental «n’est pas justifié»
Le recouvrement des droits de douanes sur les produits importés dans l’UE du Sahara Occidental occupé avant la publication de l’arrêt de la Cour européenne de justice (CJUE), qui a conclu que les accords d’association et de libéralisation UE-Maroc, ne sont pas applicables à ce territoire, «n’est pas justifié», a estimé le commissaire européen aux affaires économiques, Pierre Moscovici.
«Les autorités douanières nationales ne devraient pas engager des procédures de recouvrement liées aux importations des produits du Sahara Occidental survenues avant le 22 décembre 2016», a écrit le commissaire européen dans sa réponse à l’eurodéputée Paloma Lopez, qui interpellait la commission sur l’application de l’arrêt de la CJUE, notamment sur les droits de douanes non payés sur les importations en provenance du Sahara Occidental, importations qu’elle a qualifiée d’«illégales» en raison d’une mauvaise mise en œuvre des accords UE-Maroc.
«(…) La commission a informé les autorités douanières des Etats membres que, compte tenu de la nature exceptionnelle des circonstances de l’affaire, exposées dans la décision de la cour, il n’est pas justifié de recouvrir les montants pertinents des droits de douanes auprès des entreprises importatrices», a-t-il expliqué. Le commissaire européen a rappelé, à ce titre, que des «lignes directrices» sur les implications de l’arrêt de la CJUE ont été communiquées aux autorités douanières des Etats membres de l’union, prévoyant qu’en cas de doutes fondés quant à l’origine des marchandises, les autorités douanières doivent procéder à des enquêtes, conformément aux modalités de coopération administrative énoncées au titre de l’article VI du protocole 4 de l’accord d’association UE-Maroc.
Relevant le statut «séparé et distinct» garanti au territoire du Sahara Occidental par la charte des Nations unies, la CJUE a affirmé dans son arrêt qu’«il est exclu de considérer que l’expression territoire du royaume du Maroc, qui définit le champ territorial des accords d’association et de libéralisation, englobe le Sahara Occidental et, partant, que ces accords sont applicables à ce territoire».
Pierre Moscovici avait affirmé que «la commission travaille sur le meilleur moyen de donner suite à la décision de la cour», en tenant compte «(…) des intérêts du peuple du Sahara Occidental et en vue de préserver les échanges commerciaux dans un contexte de sécurité juridique».
«Les propos du commissaire européen vont dans le bon sens, à partir du moment où la commission européenne s’est enfin résolue à mettre en application l’arrêt de la CJUE, en reconnaissant explicitement que les produits en provenance des territoires occupés du Sahara Occidental ne seront plus soumis au régime tarifaire préférentiel appliqué dans le cadre des accords commerciaux UE-Maroc, avec une prise d’effet le 22 décembre 2016, soit au lendemain du jugement de la CJUE», a réagi l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles, Amar Belani. Il a fait savoir dans ce contexte que les discussions en cours entre la Commission européenne et le Maroc sur la mise en œuvre de l’arrêt de la CJUE «buttent sur la notion de ‘‘consentement’’ que la partie marocaine tente de contourner en mettant en avant la notion de ‘‘population locale’’, qui bénéficierait également de l’exploitation des ressources naturelles, qui se fait dans son intérêt et à son seul bénéfice».
En effet, la CJUE a souligné dans son arrêt du 21 décembre 2016 qu’«il ne peut y avoir aucune exploitation économique au Sahara Occidental sans le consentement du peuple sahraoui». Selon l’ambassadeur d’Algérie à Bruxelles, l’autre aspect important sur lequel achoppent les discussions en cours entre la commission et le Maroc concerne «la production d’indications chiffrées, étayées par des études socioéconomiques, sur les retombées prétendument positives des accords commerciaux conclus entre l’UE et le Maroc sur le peuple sahraoui». Il a ainsi fait remarquer que «les bénéficiaires des fonds européens sont principalement les opérateurs économiques et les colons marocains présents sur un territoire illégalement occupé par le Maroc».
R. I.
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