Projet de loi sur l’asile et l’immigration : vers une France forteresse ?
De Paris, Mrizek Sahraoui – Le projet de loi «Asile et Immigration» sera soumis à l’ordre du jour du Conseil des ministres de ce mercredi 21. Avec ce projet de loi – qui traduit la vraie vision d’Emmanuel Macron en matière d’accueil des étrangers fuyant la guerre et la famine aux antipodes de celle portée lors de la campagne électorale –, la France s’érige doucement, mais sûrement, en forteresse, ce qui devrait logiquement flatter les défenseurs d’une Europe en barbelés et rideaux de fer comme aux à (ses) heures sombres.
Plusieurs associations de défense des réfugiés en transit vers le Royaume-Uni, des migrants, demandeurs d’asile et des sans-papiers, auxquels se sont joints l’Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) et la CGT s’en vont debout contre cette proposition de loi portée par le ministre de l’Intérieur, Gérard Collomb, qui confie en privé «en avoir un peu marre de passer pour le facho de service».
L’homme, qui écrivit il n’y a pas si longtemps que «la chancelière Merkel et la société allemande dans son ensemble ont été à la hauteur de nos valeurs communes ; elles ont sauvé notre dignité collective, en accueillant des réfugiés en détresse, en les logeant, en les formant», a, depuis, tourné casaque et passé à autre chose. Désormais, l’heure est à la fermeture des frontières, au durcissement du droit d’entrée, de séjour et d’asile, que l’on tente d’atténuer par cette nouvelle formule «humanité et fermeté» qui n’est rien de moins qu’une vaste escroquerie, au regard du traitement réservé aux migrants parqués à Calais.
Si, selon le gouvernement, l’objectif du projet est «la maîtrise de l’immigration» et «un droit d’asile effectif» dont les délais d’instruction seraient portés de 11 à 6 mois, ce que l’on en entend moins, ce sont les autres dispositions plus répressives, comme la mesure phare du texte qui prévoit le doublement de la durée maximale de rétention ; l’augmentation de 16 à 24 heures la durée de la rétention administrative ; le renforcement du régime de l’assignation à résidence ou encore le délit de franchissement non autorisé des frontières extérieures à l’espace Schengen, puni désormais d’un an d’emprisonnement et 3 750 euros d’amende.
Avec la loi sur la moralisation de la vie publique qui n’a d’authentique que le nom puisque l’on est passé de «la République du soupçon», à «la République du caleçon» (deux ministres sont soupçonnés de harcèlements sexuels), accusent ses détracteurs, la réforme du code du travail perçue comme un coup d’Etat social plus qu’une loi salvatrice de nature à résorber le chômage, la future loi visant la structuration de l’islam de France, et, maintenant, le projet de loi sur l’asile et l’immigration, Emmanuel Macron veut réformer… en détruisant les acquis.
M. S.
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