Renégociation des accords UE-Maroc : le Parlement européen «surpris» par l’opacité de la Commission européenne
Le président de la Commission du commerce international au Parlement européen, Bernd Lange, s’est dit, mardi, «surpris» et «déçu» par l’opacité dont a fait preuve la Commission européenne lors des négociations avec le Maroc sur la conclusion d’un accord additionnel à l’accord d’association en vue de se conformer à l’arrêt de la Cour européenne de justice (CJUE). «Je suis surpris par cette procédure», a-t-il déclaré lors d’un échange de vues de sa commission avec des représentants de la Commission européenne sur l’accord paraphé le 31 janvier par l’UE et le Maroc, dénonçant un «accord conclu à huis clos».
Bernd Lange a jugé d’ailleurs «inacceptable» la manière avec laquelle la Commission européenne a mené les négociations, déplorant la marginalisation du Parlement européen dans ce dossier. Le député européen, Florent Marcellesi, s’est dit, de son côté, «abasourdi» par la démarche de la Commission européenne qui est allée chercher le consentement des colons marocains sur l’extension de l’accord d’association UE-Maroc au Sahara occidental.
«Ce que vous faites est contraire à l’arrêt de la CJUE», a-t-il lancé à l’adresse des représentants de l’exécutif européen. Dans son arrêt rendu le 21 décembre 2016, la CJUE a conclu que les accords d’association et de libéralisation UE-Maroc ne s’appliquent pas au Sahara Occidental. Elle a également souligné que si l’accord UE-Maroc devait s’appliquer au Sahara Occidental, il faudrait un consentement préalable du peuple sahraoui, c’est-à-dire du Front Polisario, reconnu par l’ONU comme le représentant du peuple du Sahara Occidental depuis 1979.
L’eurodéputé Klaus Buchner a accusé, pour sa part, la Commission européenne de «fouler aux pieds» l’arrêt de la CJUE, dénonçant les pratiques de cette Commission qui «négocie avec le gouvernement marocain et demande, a posteriori, le consentement de la population». Choquée par l’attitude de la Commission européenne, l’eurodéputée Bodile Valéro a reproché aux représentants de cette Commission de «ne pas faire l’effort d’essayer de faire croire aux parlementaires que l’exécutif tente de se conformer à l’arrêt de la CJUE».
Nécessité de respecter l’arrêt de la CJUE
Les députées européennes Anne-Marie Mineur et Lola Sanchez Caldentey ont insisté sur la nécessité de respecter l’arrêt de la CJUE. Si pour l’eurodéputée Mineur, il n’y a qu’une seule solution possible : se conformer à l’arrêt de la CJUE, la députée européenne Sanchez estime que l’UE doit non seulement se conformer à cet arrêt mais doit également prendre en compte les conclusions de l’avocat général de cette même Cour et qui a jugé, il y a quelques jours, que l’accord de pêche UE-Maroc est «invalide».
«Le Parlement européen ne votera pas un accord illégal», a-t-elle prévenu. L’eurodéputée Maria Arena a suggéré, de son côté, de soumettre l’accord paraphé par l’UE et le Maroc le 31 janvier dernier à l’appréciation de la CJUE pour vérifier sa conformité avec la décision rendue le 21 décembre 2016, avant que le vote au niveau du Parlement européen. La rapporteur de la Commission du commerce international (INTA), Patricia Lalonde a rappelé, par ailleurs, aux députés européens qu’il était de leur responsabilité de «s’assurer de la représentativité des organisations consultées» pour obtenir le consentement du peuple sahraoui et de «la justesse et du caractère non ambigu du consentement exprimé» par le peuple sahraoui.
Le représentant de la Commission européenne, Perreau De Pinnink Fernando, a précisé que le projet d’accord paraphé le 31 janvier dernier entre l’UE et le Maroc «signifie simplement que le texte est désormais fixé». Selon ce haut responsable, «aucun engagement politique n’a été pris tant qu’une proposition n’a pas encore été faite au Parlement ou au Conseil». «C’est au législateur de se prononcer», a-t-il ajouté, soulignant que «s’il devait y avoir des éléments nouveaux (…) il faudrait éventuellement revoir le texte».
R. I.
Commentaires