Expulsion d’El-Hadi Doudi : Paris se débarrasse d’un «allié» encombrant
Par R. Mahmoudi – Signe de durcissement des autorités politiques et judiciaires européennes envers les extrémistes islamistes, la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), qui avait suspendu il y a deux jours l’expulsion de l’imam salafiste El-Hadi Doudi, vient d’autoriser finalement son expulsion vers l’Algérie. L’arrêté d’expulsion a été pris à son encontre par le ministère de l’Intérieur «pour ses prêches radicaux», rapport l’agence AFP.
Le revirement de la CEDH s’explique, selon un communiqué de la cour, par de nouvelles informations fournies par les parties. La cour avait alors accordé un délai de 72 heures au gouvernement français «afin de rassembler les informations complémentaires nécessaires à une prise de décision éclairée». Elle n’a finalement pas tenu compte des arguments avancés par l’avocat du salafiste, invoquant notamment «le risque que son client subisse des tortures ou traitements inhumains ou dégradants» s’il était renvoyé par les autorités françaises vers l’Algérie.
Agé de 63 ans, l’imam de la mosquée As-Sounna, sise en plein cœur de Marseille, s’est vu reprocher des prêches «très radicaux». Il s’agissait notamment d’«actes de provocation explicite et délibérée à la discrimination, à la haine ou à la violence contre une personne déterminée ou un groupe de personnes», en l’occurrence les femmes, les juifs, les chiites, les personnes commettant l’adultère, selon les termes de la demande d’expulsion du ministère de l’Intérieur.
Vue sous un autre angle, cette décision d’expulsion d’un islamiste extrémiste vient remettre en cause de façon éclatante la longue et dangereuse compromission des autorités politiques et sécuritaires françaises avec les islamistes radicaux depuis les années 1990. Il faut rappeler que Paris a offert pendant cette période toutes les largesses possibles aux militants islamistes du FIS pour se structurer en Hexagone et organiser toute forme de soutien logistique et financier au profit des maquis du GIA. Les différents gouvernements français qui se sont succédé continuaient à fermer l’œil sur des activités qui étaient pourtant illégales, tant que celles-ci servaient leurs intérêts stratégiques et leur servaient notamment de moyen de pression sur Alger.
Dans un article paru il y deux semaines, le quotidien américain The New York Times est revenu sur l’expulsion alors en cours du prédicateur salafiste algérien installé à Marseille. L’auteur de l’article affirme que l’imam El-Hadi Doudi «n’est pas un prédicateur ordinaire (…). Il est peut-être le principal défenseur de l’islam fondamentaliste en France. Son influence s’étend à travers l’Europe, où son avocat dit qu’il est le seul imam autorisé à émettre des fatwas», écrit le journal sur cet extrémiste qui, «en 37 ans, s’est attaqué aux juifs, aux femmes et au monde moderne» sans que les autorités françaises aient réagi à «ses sermons intolérants». Le quotidien américain révèle même que ces dernières en ont fait «leur allié». Il était, donc, temps de s’en débarrasser.
R. M.
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