Sahara Occidental : universitaires et chercheurs appellent Macron à «corriger» sa position
Plus de cent universitaires et chercheurs internationaux ont demandé au président Emmanuel Macron de «corriger» la position de la France au bénéfice du droit au Sahara Occidental, soulignant que la France a une «lourde» responsabilité dans la non-décolonisation de ce territoire occupé par le Maroc.
«Il est peut-être encore temps pour l’Etat français de corriger sa position au bénéfice de l’application du droit au Sahara Occidental, en jouant un rôle moteur dans une résolution pacifique du conflit aux côtés des institutions internationales», ont affirmé ces universitaires et chercheurs de plusieurs pays, dont la France, l’Espagne, la Grande-Bretagne, les Etats-Unis, la Suisse, l’Italie et le Japon, dans une lettre ouverte au président français transmise mercredi à l’Elysée et dont l’APS a obtenu une copie.
«La France soutient chaque année au mois d’avril, au Conseil de sécurité, la position marocaine de refus d’élargissement du mandat de la mission de maintien de la paix des Nations unies (Minurso) à la surveillance des droits humains, mais aussi de mise en œuvre d’un référendum d’autodétermination, objectif premier du cessez-le-feu de 1991 et, ne l’oublions pas, exigence des Nations unies depuis 1966», ont-ils rappelé, soulignant que cette position «permet à l’Etat marocain – que l’ONU, l’OUA-UA et l’UE continuent de considérer comme occupant ce territoire – de poursuivre son entreprise de colonisation en favorisant notamment le déplacement de populations en provenance du Maroc, en emprisonnant et en ‘‘jugeant’’ des prisonniers politiques sahraouis sur le sol marocain, deux motifs flagrants (parmi d’autres) de violation du droit international et du droit humanitaire international».
La jugeant «inacceptable», les signataires de cette longue lettre, pleine de rappels et d’arguments historiques et juridiques qui montrent que le Maroc ne jouit d’aucune souveraineté sur le Sahara Occidental, ont indiqué que cette colonisation «passe actuellement par une présence massive des forces policières et militaires marocaines dans les principales villes de ce territoire, forces dont la mission est aujourd’hui d’étouffer tout mouvement sahraoui de protestation pacifique».
«Elle passe, en outre, par une exploitation décomplexée des ressources naturelles de ce territoire, et notamment du phosphate et des réserves halieutiques, principales richesses convoitées du Sahara Occidental. Elle passe encore par une politique volontariste de transferts de populations, déséquilibrant rapidement la sociologie du territoire. Elle passe enfin par une acculturation planifiée de la société sahraouie, s’appuyant sur une politique ostensible de folklorisation de la culture locale qui cache mal une entreprise plus souterraine, scolaire notamment, de marginalisation de cette même culture», ont-ils soutenu, citant des cas de violations des droits de l’Homme, notamment concernant les prisonniers politiques sahraouis détenus dans des prisons marocaines.
Pour eux, «rien ne peut plus aujourd’hui justifier cette position française, sinon des intérêts économiques et géostratégiques de très courte vue, dont les conséquences sont déplorables pour la stabilité au Maghreb et sur l’émigration irrégulière vers l’Europe», s’interrogeant : «Comment l’Etat français peut-il s’évertuer depuis quelques années à revendiquer un rôle majeur dans le maintien de l’ordre politique régional au Sahara-Sahel (…), tout en retardant l’application du droit international au Sahara Occidental ?»
«Nous demandons donc à l’Etat français, dont vous présidez aux destinées, de mettre la question du Sahara Occidental à l’agenda des prochaines réunions du G5 Sahel, d’encourager l’Etat marocain à respecter scrupuleusement le droit international et le droit humanitaire international, à libérer les détenus politiques sahraouis, à soutenir une relance rapide de l’organisation d’un référendum d’autodétermination» du peuple sahraoui, ont-ils écrit, soulignant que toute solution proposée «doit être fondée sur le respect du droit international».
R. I.
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