Si j’avais des enfants
Par Akram Chorfi – Nous avons reçu ce bout de lettre que nous avons voulu partager avec nos lecteurs sur la manière dont un père peut entrevoir le façonnement de sa progéniture pour en faire de véritables citoyens ; un bout de lettre qui nous a été adressé par un ami lecteur, encore célibataire, mais sans doute endolori par l’amertume de voir se désagréger une société sur laquelle il a porté tant d’espoir. Il se projette en tant que père et dit ceci :
«Si j’avais des enfants, je leur imposerai, à la naissance, la discipline, je me ferai, pour leur plus grand bien, le meilleur des dictateurs. Pas pour les terroriser, les maltraiter ou les soumettre. Plutôt pour leur inculquer les valeurs de grandeur de l’âme et d’élévation de l’esprit, pour les pousser à se hisser culturellement vers des niveaux enviables, pour les amener à être performants dans leurs études, à être efficaces dans la préparation de leurs projets les plus simples, à être responsables socialement face à leurs grands-parents, leurs voisins et leur prochain en général.
«Mes enfants seront – ou ils ne seront jamais – redevables à leur pays. Je ne leur apprendrai pas les slogans creux des Appareils qui abrutissent les plus intelligents ; je leur apprendrais que l’amour de l’Algérie ne se proclame pas par le verbe et que les vivas vociférés par le plus grand nombre n’assurent en rien la pérennité du pays. Ils sauront à jamais que l’amour de l’Algérie est un acte quotidien de citoyenneté et que la meilleure façon d’aimer l’Algérie, c’est d’œuvrer à être un bon citoyen et un acteur du développement économique et du progrès social.
«Ils comprendront, avec moi, qu’être quelqu’un ne signifie nullement richesse, renommée et pouvoir. Etre quelqu’un voudra dire pour eux simplement apprendre un métier, s’intégrer socialement, compter sur soi, compter pour les autres, être, à part entière, membres du corps social dont, harmonieusement, dans le respect de ses règles, de ses valeurs, de ses lois, ils contribueront à perpétuer la bonne marche.
«Mes enfants apprendront à comprendre, mais jamais à apprendre pour que le jour où ils sont évalués, ils puissent penser par eux-mêmes et produire le fruit de leur intelligence, quitte à avoir des notes plus modestes que les 20/20 en philosophie que dispense aujourd’hui l’école parcœuriste.
«Mes enfants, enfin, ne discuteront pas football devant les poubelles éventrées et puantes des cités et ne cultiveront pas le choléra et autres maladies de la misère sociale en rejetant la responsabilité sur l’Etat. Mes enfants seront citoyens ou ne seront pas. L’avenir de mon pays est à ce prix.»
A. C.
Comment (17)