A l’ère de l’argent roi : de la médiocrité de l’être à la puissance de l’avoir

dollar l'argent
La vraie monnaie divisionnaire ? L'argent. D. R.

Contribution de Khider Mesloub – A l’ère de l’argent roi, n’importe quel vulgaire plébéien est assuré de se hisser aux cimes du pouvoir (j’allais écrire crimes du pouvoir, tant l’homologie des mots induit l’homogénéité des maux : «cime du pouvoir» rime avec le pouvoir du crime ; tout pouvoir s’édifie sur l’amoncellement de cadavres politiques, économiques, sociaux) par la grâce de son compte bancaire alimenté par ses prédations. N’importe quel médiocre roturier est capable d’accéder aux palais de la puissance politique (j’allais écrire la puissance phallique tant l’érection de tout pouvoir est une forme de sublimation érotique de l’impuissance sexuelle de tous les gouvernants) grâce à ses liasses de billets amassées à force de prévarications. Et par la grâce de sa puissance financière, se faire respecter, admirer, aduler, élire, obéir. Exiger des autres pour lui de mourir à la tâche à force de travail exténuant et aliénant, de se sacrifier sur le champ de la patrie, cette abstraction nationale régie par les grands argentiers pour leur seul profit.

Quand l’argent se saisit de l’être, l’être se mue en son agent vil et servile. Il permet de blanchir l’âme la plus ténébreuse, d’absoudre les criminels de guerre, de disculper les puissants scélérats, les potentats du pouvoir et des affaires.

Il permet d’embellir la laideur par sa seule possession. De transmuer l’ignorance en intelligence tant l’argent rend brillant. Il s’impose comme l’argument d’autorité, voire l’autorité de régulation de l’argumentation, tant sa puissance exerce sur tous les sujets la censure. Il permet d’unir des individus aussi hétérogènes qu’antagonistes, former des couples aussi dissemblables qu’incompatibles, par son unique pouvoir d’aimantation transactionnelle vénale.

De vacciner une minorité de privilégiés contre le virus de l’infortune, au détriment de l’immense majorité de l’Humanité infectée par la pandémie d’indigence, ce Covid-19 de la misère chronique inoculé par la société marchande, dominée par les classes financières parasitaires qui vouent une vénération absolue à leur dieu-argent couplée à une aversion atavique au peuple.

Quand tout se monnaye, même l’honneur et la dignité, la vertu et la morale, c’en est fini de l’Humanité. Méditons ce texte de jeunesse de Karl Marx : «Ce que je peux m’approprier grâce à l’argent, ce que je peux payer, c’est-à-dire ce que l’argent peut acheter, je le suis moi-même, moi le possesseur de l’argent. Telle est la force de l’argent, telle est ma force. Mes qualités et la puissance de mon être sont les qualités de l’argent ; elles sont à moi, son possesseur. Ce que je suis, et ce que je puis, n’est donc nullement déterminé par mon individualité. Je suis laid, mais je puis m’acheter la plus belle femme ; aussi ne suis-je pas laid, car l’effet de la laideur, sa force rebutante, est annulée par l’argent. Je suis, en tant qu’individu, un estropié, mais l’argent me procure vingt-quatre pattes ; je ne suis donc pas estropié ; je suis un homme mauvais, malhonnête, sans scrupule, stupide : mais l’argent est vénéré, aussi le suis-je de même, moi qui en possède. L’argent est le bien suprême, aussi son possesseur est-il bon ; que l’argent m’épargne la peine d’être malhonnête, et on me croira honnête ; je manque d’esprit, mais l’argent étant l’esprit réel de toute chose, comment son possesseur pourrait-il être un sot ? De plus, il peut s’acheter des gens d’esprit, et celui qui en est le maître n’est-il pas plus spirituel que ses acquisitions ? Moi qui, grâce à mon argent, suis capable d’obtenir tout ce qu’un cœur humain désire, n’ai-je pas en moi tous les pouvoirs humains ? Mon argent ne transforme-t-il pas toutes mes impuissances en leur contraire ?

Si l’argent est le lien qui m’unit à la vie humaine, qui unit à moi la société et m’unit à la nature et à l’homme, l’argent n’est-il pas le lien de tous les liens ? Ne peut-il pas nouer et dénouer tous les liens ? N’est-il pas, de la sorte, l’instrument de division universel ? Vrai moyen d’union, vraie force chimique de la société, il est aussi la vraie monnaie divisionnaire.» (Karl Marx, Manuscrits de 1844.)

M. K.

Comment (9)

    Brahms
    25 mars 2021 - 17 h 10 min

    Exemple vous achetez une Porsche à 58 000 €,

    Mais, au bout d’un mois, vous n’en voulez plus. Le commerçant vous la reprendra 50 000 €.

    En échange d’argent, on achète que du matériel, des babioles que l’on entasse dans son logement jusqu’au jour où tout part à la déchetterie. Dans les supermarchés, les galeries, les gens existent que s’ils achètent de la marchandise et dans les publicités à la télévision, on ne parle que de commerce, d’achat, on incite les gens à consommer et si vous ne consommez pas, vous devenez malheureux.

    Anonyme
    25 mars 2021 - 16 h 53 min

    Le pire est quand l´art et la philosophie se soumettent à l´argent. Dans ce cas, il n y plus rien à attendre de l´humanité.

    yasine
    25 mars 2021 - 14 h 46 min

    Monsieur Khider Mesloub
    Il faut preciser que votre article ne concerne que l’algerie et les pays dictatoriaux .
    Dans les pays democratiques , le plebeien comme le nomme n’a aucune chance
    d’entrer dans l’antre du pouvoir et encore moins s’enrichir .

      Bent El Hadj
      25 mars 2021 - 15 h 01 min

      @ yasine l Algérie N Est Pas un Pays Dictatorial,

      HOP LA !
      25 mars 2021 - 15 h 44 min

      C’est l’occident avec son contrôle numérique et ses lois muselantes pro-lbgrtxy contre la liberté d’expression , le véto ONG complices, l’ingérence arrogante et les valeurs humaines qui est dictatorial.
      Si tu n’adhère pas à leurs thèses, tu es considéré comme térroriste, extrémiste, Islamiste et rétrograde.

    Niesztche le Véridique !
    25 mars 2021 - 13 h 56 min

    Ainsi parlait Zarathoustra… le crépuscule des idôles.
    Médiocrité des médias et religion ont une très grande responsabilité dans le retard du pays .
    Chacune de ces notions devait equilibrer l’autre, mais hélas chez nous les deux se sont entendues pour le pire! A développer plus tard, le temps de la fermentation neuronale.

    Faux lit des grandeurs.
    25 mars 2021 - 13 h 12 min

    Dépendamment de celui qui le détient, car l`argent a permis aux pays actuellement développé de s`émanciper, s`éduquer, chasser la pauvreté etc. Quand l`argent tombe entre les mains de voyous comme ceux qui gouvernent les pays sous développés, cet argent devient ce que vous décrivez plus haut. les dictateurs actuels aiment leur personne plus que que leur nation.ou leur peuple. ils estiment que la richesse d`un pays leur appartient. L`argent donne le pouvoir et le pouvoir rend fou. un jour un simple petit chef de daira d`une localité perdu m`a dit je cite :^tu es sur mon territoire^^. Donc j`ai commencé par quitter son territoire ensuite j`ai quitté tout simplement mon pays car mon président marocain pensait pareil.

    Bent El Hadj
    25 mars 2021 - 12 h 57 min

    fulgurant article qui résume Ce monde capitaliste auquel presque toute la humanité y est soumise… En ajoutant que les Rares et authentiques personnes qui se refusent au pouvoir de L argent et toute sa Laideur qu il contient ne peuvent espérer un moindre bien …

    Belveder
    25 mars 2021 - 11 h 28 min

    J ai toujours pensé que HADJ LAKHDER avec sa IMMARRA était l incarnation de l Algerie des années 2000.
    suivi par el Bouchiii des Analphabétes milliardaires…sic sic

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