L’art de devenir un «Bar-Bar»
Une contribution de Slim Bensali – L’ère du prince qui voulait présider à perpétuité est révolue et, avec l’enterrement de celui-ci, une page est tournée. Pour héritage, ce séculaire revanchard a laissé un pays ruiné, corrompu et dévasté et terriblement ravagé. Le long de son règne, on a vu l’essor de prédateurs, rapaces et têtes de vipères, sortis de nulle part, qui se sont enrichis en puisant, et sans aucune utile contrepartie, dans les réserves du pays. Réserves accumulées grâce à cette manne des hydrocarbures, octroyée gracieusement par Dame Nature à ce pays.
Mais avant lui, et on a souvent tendance à l’oublier, il y avait eu l’autre prince, élégant dans ses démarches et ses tenues mais incroyablement ignare et écervelé, et qui avait, certainement sous influences d’autrui, ouvert sauvagement le pays à la prédation et la dévastation et à la débâcle et la déconfiture. C’est principalement en son temps qu’avait commencé à se propager ces célèbres dénominations, Monsieur Sucre et Monsieur Huile, patronymes railleusement collés à ces détrousseurs qui avaient accaparé le monopole du lucratif business de l’importation du sucre, de l’huile et autres nécessaires denrées alimentaires. Les germes du pillage illicite de la rente, produite par cette étendue de la patrie richement ensablée, et de la corruption dévastatrice avaient été plantés en ces moments précis. Le prince récemment enterré n’avait fait que les développer et les étendre de la base au sommet et à l’intérieur de la pyramide du système établi.
Entre les deux périodes tenues par nos deux honorables princes contestés, il y a eu la décennie des monstres déchaînés, qu’on ne pourra jamais oublier. Durant cette période et aux moments où des innocents se faisaient sauvagement décapiter aux couteaux aiguisés des islamo-terroristes enragés, d’autres, vulgaires protégés et choyés de certains dignitaires de cet avilissant et vieillissant système, s’adonnaient à grossir leurs bedaines et gonfler leurs portemonnaies. Et ce n’est indubitablement pas loyalement et honnêtement qu’ils le faisaient.
Parmi ces énergumènes cités ci-dessus, il y a celui qui n’a pas eu honte de nous narguer, non seulement avec son ostentatoire mode de vie d’oligarque non assumé, mais aussi en étalant, sur Forbes s’il vous plaît, ses trois milliards de dollars dérobés et subtilisés. Il a même tenté de nous faire fantasmer de cette nouvelle ville de vingt milliards de dollars qu’il voulait, tenez-vous bien, du néant créer avec les devises puisées dans les réserves du pays, lui qui s’était hasardé, sans honneur et sans dignité et croyant être à la hauteur de l’honnêteté – schizophrénie et psychopathie de son espèce aidant – à nous montrer sa devise de grandir et de s’enrichir, à travers son torchon qu’un certain spécimen de la niaiserie lui a rédigé, «Voir grand, commencer petit et aller vite».
Que ceux qui croient que l’ère de Monsieur Huile et Monsieur Sucre de notre élégant et distingué prince aux cheveux argentés est révolue se détrompent. Ce n’est qu’un simple changement de casquette et de méthodes. Cet énergumène cité ci-dessus a repris les manettes à sa façon, de l’huile et du sucre comme je vous l’ai déjà dit. Ce qui s’importait cru il y a des décennies s’est transformé actuellement en une parfaite fourberie, faisant croire hypocritement à une industrialisation du pays. Profiter des avantages fiscaux alloués pour n’avoir ni taxes ni impôts à payer, ouvrir des manufactures localement et parfois dans des lieux délabrés, acheter des machines et outils d’outre-mer et de second degré et tout déclarer neufs, s’il vous plaît, importer la matière première et les intrus, et sans oublier bien sûr de tout surfacturer. Lancer la machine de propagande pour achalander son lucratif business et amadouer les détenteurs pécuniaires pour continuer à puiser dans les réserves du pays, et la roue est magiquement bien huilée. Rien d’ingénieux et rien d’utilement développé, les bourricots, comme vous le savez, ont depuis longtemps pris le dessus. Ça coûte plus cher au Trésor et aux contribuables qu’il y a des décennies. Et toute cette crasseuse monnaie va indiscutablement grossir et remplir les bourses de notre cher détrousseur homme d’affaires et ignoble prédateur, qu’il dissimule dans des paradis étrangers.
C’est que ce prédateur et tête de vipère a bien commencé particulièrement petit, comme il le dit, au moment où la communauté était plutôt préoccupée par son existence et sa survie, au moment où les salopards forcenés égorgeaient et assassinaient sans miséricorde et sans pitié. Sa première fortune a été amassée dans le ciment et le rond à béton, matières utilisées dans la construction et le bâtiment. La technique était bien rodée et parfaitement cadrée ; transférer les devises du pays dans des comptes personnels ouverts à l’étranger et souvent sous des noms empruntés, acheter dans un pays pas cher, peu scrupuleux sur la qualité et pas du tout soucieux de la constitution de la matière, faire transiter cette marchandise par un autre pays pour profiter des spécifiques avantages accordés, avant de la faire rentrer au pays. La facture de cette marchandise importée ayant grossi le long de ce cheminement suivi.
Et pour vous donner une idée, le béton seul est une structure fragile, qui a besoin, pour être résistant et souple, d’une solide armature. Le béton peut être sujet à la rupture, mais lorsqu’il est protégé par une armature, il se révèle plus résistant. Le rond à béton est donc utilisé en renforcement du béton afin de lui donner un caractère armé ; sa surface nervurée permet une haute adhérence avec le béton. Dans le cas où ce rond à béton est préparé avec tricherie et des matériaux de basse qualité, son utilité devient caduque et périmée, et les conséquences de son utilisation peuvent s’avérer funestes et néfastes.
Ce rond à béton, ayant permis l’enrichissement et la distinction de notre gentlemen importateur, s’était surtout distingué lors du séisme d’il y a environ deux décennies, lorsque la terre avait tremblé sur le flanc est d’Alger. C’est là où l’on avait vu des bâtiments, comme des châteaux de cartes, s’écrouler et cesser de tenir sur leurs pieds. Des investigations poussées avaient montré que la fragilité de ces édifices mal construits était bel et bien due à l’imperfection et la mauvaise qualité du rond à béton utilisé. Il n’était, tout simplement, pas conforme aux normes exigées. Le coût de cette tricherie s’était avéré très élevé, sans mentionner les vies malheureusement perdues qui se comptaient par milliers. Et dans un pays où la justice était une affaire de protégés, de copains et de familles, cette mascarade (crime ?) avait été, fâcheusement dans l’ombre, étouffé.
Ces rapaces et prédateurs qui ont dévasté le pays ne pouvaient imaginer vers quels désastres leurs néfastes actions et leurs funestes manipulations allaient emmener ce pays. Préoccupés à amasser leurs colossales et illégales fortunes et les transférer à l’étranger, ils n’avaient pas vu venir la vague qui a déferlé dans tous les coins du pays. Cette vague qui avait balayé dans son sillage, notre dernier prince déchu, à qui on souhaite paix à son âme, malgré ses divagations, durant deux décennies d’infructueuse et désastreuse souveraineté.
Certains de ces oligarques ont été comme de vulgaires voleurs emmurés, et d’autres comme de sinistres criminels claquemurés. Comme la justice n’est pas encore totalement recouvrée, je ne pourrai vous dire par quel miracle notre flamboyant gentleman détrousseur a pu regagner sa liberté. Un autre mystère qui donnera du fil à retordre à celui qui voudra s’aventurer à le déchiffrer.
Il continue, et jusqu’à présent, à prétendre à l’honnêteté, qu’il n’a bien sûr jamais connue. Son ventre s’étant trop élargi, il s’est aussi hasardé, rien que pour faire plaisir à ses hôtes étrangers, à nous ramener des carcasses de manufactures dont les produits ne pouvant plus s’écouler dans leurs propres pays étant, depuis pas mal de temps, à l’agonie.
S’enrichir en commençant petit, voir grand et aller vite est une belle devise pour participer avec honneur et gloire à la grandeur du pays si, et seulement si, elle ne se peint pas de malhonnêteté, de corruption et de prédation. En dehors de ces qualités, ça ne sera qu’une façon, avilissante et abaissante, de devenir, en pure et due forme, un vulgaire et avéré «Bar-Bar».
S. B.
Ecrivain
Ndlr : Les opinions exprimées dans cette tribune ouverte aux lecteurs visent à susciter un débat. Elles n’engagent que l’auteur et ne correspondent pas nécessairement à la ligne éditoriale d’Algeriepatriotique.
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