Expulsion d’Algériens : la note secrète qui prouve que Gérald Darmanin bluffait
Par Houari A. – Le ministre français de l’Intérieur savait pertinemment que l’administration algérienne n’allait pas céder à son chantage de réduire de moitié le nombre de visas si Alger refusait d’établir des laissez-passer consulaires aux ressortissants algériens que Paris voudrait expulser de France. Sa menace était un coup de bluff et cela a été révélé par un courrier d’une direction relevant de son département. C’est le site Street Press qui en fait état dans un article intitulé «Il est impossible d’expulser les sans-papiers algériens» en s’interrogeant : «Pourquoi l’Etat français les enferme quand même ?»
Dans un courrier confidentiel daté du 6 décembre 2021, la Direction générale des étrangers en France (DGEF), relevant du département de Gérald Darmanin, a été instruite de n’envisager de «conduire un éloignement vers Alger» et de «n’autoriser les poursuites des retours» que pour les ressortissants algériens «volontaires au retour et détenteurs d’un document de voyage en cours de validité, après validation du retour par la Direction de l’immigration et de l’attaché de la sécurité intérieure à Alger». «Les seuls qui peuvent prétendre à une autorisation d’éloignement sont les dossiers qui remplissent certaines conditions», précise l’injonction du ministre, qui exige, en fait, des formalités évidentes, comme la détention d’un passeport en cours de validité ou du fameux laissez-passer consulaire objet du litige entre Paris et Alger, les procédures liées à la crise sanitaire et la capacité du concerné à acheter lui-même son billet d’avion.
Une fois toutes ces conditions réunies, l’administration française prévoit de s’assurer que le concerné émet le vœu de façon claire de retourner en Algérie. «N’hésitez pas à le faire interroger sur ce point et à consigner ses réponses par procès-verbal !» insiste le département de Darmanin. Et, même une fois l’accord du ressortissant à extrader obtenu, le projet d’éloignement devra être soumis à autorisation. Ces mesures ne visent pas, pour autant, à garantir au sans-papier algérien ses droits, mais à éviter qu’un «scandale» éclate en France à quelques semaines d’une échéance électorale sensible dans laquelle l’enjeu majeur tourne autour de la question de l’immigration. L’extrême-droite avance à grands pas et s’organise autour d’un Eric Zemmour qui engrange les dividendes des erreurs des partis traditionnels, Les Républicains et le Rassemblement national, balayés par une nouvelle génération de politiciens en herbe qui profite de la grande crise sociale qui a conduit à une paupérisation sans précédent depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.
Dans sa directive, la DGEF rappelle que «les autorités centrales algériennes n’acceptent plus aucun retour forcé depuis la France» et que «ce refus concerne également les ressortissants algériens qui, lorsque cette procédure était encore en vigueur, avaient pu bénéficier d’un accord nominatif de réadmission communiqué par l’ambassade d’Algérie en France». La note précise, en outre, qu’«Alger a donné instruction à son réseau consulaire en France de ne plus assurer aucune audition consulaire et de n’accorder aucune délivrance de laissez-passer consulaire pour des retours forcés» et fait savoir que «les autorités centrales algériennes ont également annoncé ne plus appliquer le PV franco-algérien de 1994, qui autorisait notamment les éloignements au moyen d’un original de carte nationale d’identité algérienne en cours de validité ou périmée ou d’un original de passeport algérien périmé».
H. A.
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