Quand Victor Hugo le visionnaire dressait le portrait de Macron le Petit
Une contribution de Khider Mesloub – Emmanuel Macron est un homme de moyenne taille, […] c’est un personnage vulgaire, puéril, théâtral et vain. Certes, ce cerveau est trouble, ce cerveau a des lacunes, mais on peut y déchiffrer par endroits plusieurs pensées de suite et suffisamment enchaînées (et surtout déchaînées contre le peuple et les opposants). C’est un livre où il y a des pages arrachées (et surtout entachées). A tout moment quelque chose manque. Emmanuel Macron a une idée fixe, mais une idée fixe n’est pas l’idiotisme. Il sait ce qu’il veut, et il y va. A travers la justice, à travers la loi, à travers la raison, à travers l’honnêteté, à travers l’humanité, soit, mais il y va. Ce n’est pas un idiot. C’est tout simplement un homme d’un autre temps que le nôtre (et surtout d’un autre monde : celui de la Finance qu’il sait fructifier avec finesse et, surtout, petitesse, à la hauteur de sa bassesse).
Il semble absurde et fou parce qu’il est dépareillé (d’aucuns diront déphasé tant il a perdu le contact avec la réalité, autrement dit avec son peuple qu’il ne côtoie que par la violence, c’est-à-dire au moyen de sa police, devenue sa milice, sur laquelle il s’appuie pour gouverner, faire régner sa terreur démocratique : la terreur démocratique est cette nouvelle forme de gouvernance despotique, exercée en toute légitimité car elle se déploie dans un pays occidental pour qui «la démocratie est le pire des systèmes, à l’exclusion de tous les autres», comme l’avait déclaré Winston Churchill. L’Occident, pétri d’arrogance et d’ethnocentrisme, bénéficie de la bénédiction et de l’absolution pour tous ses forfaits et crimes, y compris sa dictature, auréolée de gloires politiques, nimbée de tous les prestiges institutionnels car exercée aux pays des droits de l’Homme blanc).
Seulement, il oublie ou il ignore qu’au temps où nous sommes, ses actions auront à traverser ces grands effluves de moralité humaine dégagés par nos trois siècles lettrés et par la Révolution française et que, dans ce milieu, ses actions prendront leur vraie figure et apparaîtront ce qu’elles sont, hideuses.
Emmanuel Macron se laisse volontiers entrevoir socialiste (tendance sociétale, pour qui le genre transcende l’humain ; autrement dit, l’humain s’efface devant le genre, comme l’être s’est effacé devant l’avoir, devenu la vertu cardinale du capitalisme triomphant). Il sent qu’il y a là pour lui une sorte de champ vague, exploitable à l’ambition. Alors il ne parle pas, il ment. Macron ment comme les autres hommes respirent. Il annonce une intention honnête, prenez garde ; il affirme, méfiez-vous ; il fait un serment, tremblez. Machiavel a fait des petits. Annoncer une énormité dont le monde se récrie, la désavouer avec indignation, jurer ses grands dieux, se déclarer honnête homme, puis, au moment où l’on se rassure et où l’on rit de l’énormité en question, l’exécuter. On est de son cercle intime ; il laisse entrevoir un projet qui semble, non immoral, on n’y regarde pas de si près, mais insensé et dangereux, et dangereux pour lui-même ; on élève des objections ; il écoute, ne répond pas, cède quelquefois pour deux ou trois jours, puis reprend son dessein et fait sa volonté (destructrice).
Grâce à cette façon de faire, il a toujours à son service l’inattendu, grande force et, ne rencontrant en lui-même aucun obstacle intérieur dans ce que les autres hommes appellent conscience, il pousse son dessein, n’importe à travers quoi, nous l’avons dit, n’importe sur quoi, et touche son but. Il recule quelquefois, non devant l’effet moral de ses actes, mais devant l’effet matériel (notamment force subversive, comme les valeureux Gilets jaunes l’ont acculé à devoir, dans l’affolement et la précipitation, se réfugier dans son bunker de l’Elysée lors de leur mobilisation insurrectionnelle du 8 décembre 2018).
Dans ses entreprises, il a besoin d’aides et de collaborateurs (il ne risque pas d’en manquer, la France est un pays de Collaborateurs, y compris Mélenchon le rebelle institutionnel est prêt, de manière éhontée, à collaborer avec Macron en devenant son Premier ministre) ; il lui faut ce qu’il appelle lui-même «des hommes». Diogène les cherchait tenant une lanterne ; lui, il les cherche un billet de banque à la main. Il les trouve (en France tout s’achète, surtout son intelligentsia, pour qui la prostitution intellectuelle est sa principale activité). De certains côtés de la nature humaine produisent toute une espèce de personnages dont il est le centre naturel et qui se groupent nécessairement autour de lui, selon cette mystérieuse loi de gravitation qui ne régit pas moins l’être moral que l’atome cosmique.
Aujourd’hui, il en est environné, ces hommes lui font cour et cortège ; ils mêlent leur rayonnement (d’aucuns diraient leur médiocrité) au sien. A de certaines époques de l’histoire, il y a des pléiades de grands hommes ; à d’autres époques, il y a des pléiades de chenapans (l’époque de Macron est particulièrement fertile en fripouilles).
Emmanuel Macron a réussi. Il a pour lui désormais l’argent, l’agio, la banque, la Bourse, le comptoir, le coffre-fort et tous ces hommes qui passent si facilement d’un bord à l’autre quand il n’y a à enjamber que de la honte. En attendant, depuis cinq ans, il s’étale ; il a harangué, triomphé, présidé des banquets, pris des millions (dans les caisses de l’Etat qu’il a généreusement distribués à ses amis capitalistes), donné des bals (et surtout des balles réelles contre les Gilets jaunes), dansé, régné, paradé et fait la roue ; il s’est épanoui dans sa laideur à une loge d’Opéra…
Il a réussi. Il en résulte que les apothéoses ne lui manquent pas (il a la folie des grandeurs et surtout les grandeurs de la folie… gouvernementale, cela explique la démence de sa politique sociale, économique et internationale, l’extravagance de sa personnalité clivée et clivante).
Une chose me frappe pourtant, c’est que dans toutes les qualités qu’on lui reconnaît […], dans tous les éloges qu’on lui adresse, il n’y a pas un mot qui sorte de ceci : habileté, sang-froid, audace, adresse, affaire admirablement préparée et conduite, instant bien choisi, secret bien gardé, mesures bien prises. Fausses clefs bien faites. Tout est là. Il ne reste pas un moment tranquille ; il sent autour de lui avec effroi la solitude (tant il est conscient du mépris que lui témoigne son peuple) et les ténèbres (le grondement des révoltes sociales qui le hantent) ; ceux qui ont peur la nuit chantent, lui il remue. Il fait rage, il touche à tout, il court après les projets ; ne pouvant créer, il décrète (c’est ce qui s’appelle brasser du vent).
Non, cet homme ne raisonne pas ; il a des besoins, il a des caprices, il faut qu’il les satisfasse (c’est un éternel enfant : c’est pourquoi il a toujours besoin d’une maman, de sa maman Brigitte, seule à même d’apaiser ses angoisses œdipiennes). Ce sont des envies de dictateur. La toute-puissance serait fade si on ne l’assaisonnait de cette façon.
Quand on mesure l’homme et qu’on le trouve si petit, et qu’ensuite on mesure le succès et qu’on le trouve si énorme, il est impossible que l’esprit n’éprouve pas quelque surprise. On se demande : comment a-t-il fait ? On décompose l’aventure et l’aventurier, […] on ne trouve au fond de l’homme et de son procédé que deux choses : la ruse et l’argent. La ruse : nous avons caractérisé déjà ce grand côté d’Emmanuel Macron, mais il est utile d’y insister. Le 7 mai 2017, il disait à ses concitoyens dans son manifeste : «Je me sens obligé de vous faire connaître mes sentiments et mes principes. Il ne faut pas qu’il y ait d’équivoque entre vous et moi. Je ne suis pas un ambitieux… Elevé dans les pays libres, à l’école du malheur, je resterai toujours fidèle aux devoirs que m’imposeront vos suffrages et les volontés de l’Assemblée. Je mettrai mon honneur à laisser, au bout de cinq ans, à mon successeur, le pouvoir affermi, la liberté intacte, un progrès réel accompli.»
Depuis plusieurs décennies, il y avait en France toutes sortes de choses pernicieuses : cette «sonorité», la tribune ; ce vacarme, la presse (soumise) ; cette insolence, la pensée (unique et inique) ; cet abus criant, la liberté ; il est venu, lui, et à la place de la tribune il a mis le Conseil de défense ; à la place de la presse, la censure par l’argent ; à la place de la pensée, l’ineptie ; à la place de la liberté, les LBD (lanceurs de balles de défense) ; et de par le LBD, la censure par l’argent, l’ineptie et le Conseil de défense, la France (des riches) est sauvée ! Sauvée, bravo ! Et de qui, je le répète ? D’elle-même car, qu’était-ce que la France, s’il vous plaît ? C’était une peuplade de pillards, de voleurs, de jacques, d’assassins et de démagogues (que le règne de Macron aura accentué, aggravé : la France est toujours cette peuplade de pillards, de voleurs, d’assassins et de démagogues).
Il a fallu la lier, cette forcenée, cette France, et c’est Emmanuel Macron qui lui a mis les poucettes. Maintenant, elle est au cachot, à la diète, au pain et à l’eau (c’est-à-dire réduite à la disette, et son peuple, clochardisé, vit de minima sociaux), punie, humiliée, garrottée, sous bonne garde (notamment des Etats-Unis qui l’asservit, quoi qu’en dise Macron) ; soyez tranquilles, le sieur Macron, gendarme à la résidence de l’Elysée (cette annexe de la Maison-Blanche de l’Oncle Sam), en répond à l’Europe ; il en fait son affaire ; cette misérable France a la camisole de force, et si elle bouge (l’Oncle Sam saura la corriger, la remettre dans le giron otanien)… – Ah ! qu’est-ce que c’est que ce spectacle-là ? Qu’est-ce que c’est que ce rêve-là ? Qu’est-ce que c’est que ce cauchemar-là ? D’un côté, une nation, la première des nations, et de l’autre un homme, Macron, le dernier des hommes, et voilà ce que cet homme fait à cette nation ! Quoi ! il la foule aux pieds, il lui rit au nez, il la raille, il la brave, il la nie, il l’insulte, il la bafoue ! Quoi ! Il dit : il n’y a que moi ! Quoi ! dans ce pays de France où l’on ne pourrait pas souffleter un homme, on peut souffleter le peuple ! Ah ! quelle abominable honte !
Chaque fois que Macron crache, il faut que tous les visages s’essuient ! Et cela pourrait durer ! et vous me dites que cela durera ! Non ! Non ! Non ! Par tout le sang que nous avons tous dans les veines, non ! Cela ne durera pas ! Ah ! si cela durait, c’est qu’en effet il n’y aurait pas de Dieu dans le ciel, ou qu’il n’y aurait plus de France sur la terre ! […] il restera mesquin, […] il ne sera jamais que le tyran pygmée d’un grand peuple. […] un batteur de grosse caisse des Champs-Elysées… (un caniche du capital, servile courtisan des Etats-Unis).
L’acabit de l’individu se refuse de fond en comble à la grandeur, même dans l’infamie. Faire hausser les épaules au genre humain, ce sera sa destinée. […] Il sera hideux, et il restera ridicule. Voilà tout. L’histoire rit et foudroie. […] L’historien ne pourra que le mener à la postérité par l’oreille (et la postérité le jeter à la poubelle).
Macron une fois déshabillé du succès, le piédestal ôté, la poussière tombée, le clinquant et l’oripeau et le costume-cravate détachés, le pauvre petit squelette mis à nu et grelottant, peut-on s’imaginer rien de plus chétif et de plus piteux ?
L’histoire a ses tigres. […] Elle ne mêle pas avec eux les chacals. Je ne sais quelle gangrène de prospérité matérielle menace de faire tomber l’honnêteté publique en pourriture.
Ma foi ! vivons, faisons des affaires, tripotons dans les actions du pétrole ou les complexes d’armements, gagnons de l’argent ; c’est ignoble, mais c’est excellent ; un scrupule de moins, un euro de plus ; vendons toute notre âme à ce taux ! On court, on se rue, on fait antichambre, on boit toute honte, et si l’on peut multiplier les usines d’armements en France ou les pillages des richesses fossiles d’Afrique, on demande une place.
C’est à qui fera ce trafic de soi-même le plus cyniquement, et parmi ces êtres il y a des jeunes gens qui ont l’œil pur et limpide et toute l’apparence de l’âge généreux, et il y a des vieillards qui n’ont qu’une peur, c’est que la place sollicitée ne leur arrive pas à temps et qu’ils ne parviennent pas à se déshonorer avant de mourir. L’un se donnerait pour une préfecture, l’autre pour une recette, l’autre pour un consulat, l’autre veut un bureau de tabac, l’autre veut une ambassade. Tous veulent de l’argent, ceux-ci moins, ceux-ci plus, car c’est au traitement qu’on songe, non à la fonction. Chacun tend la main. Tous s’offrent. Un de ces jours, on établira un essayeur de consciences à la monnaie.
Les mots indépendance, affranchissement, progrès, orgueil populaire, fierté nationale, grandeur française, on ne peut plus les prononcer en France. Chut ! ces mots-là font trop de bruit ; marchons sur la pointe des pieds et parlons bas. Nous sommes dans la chambre d’un malade (psychopathe).
Et la liberté de la presse ! Qu’en dire ? N’est-il pas dérisoire seulement de prononcer ce mot ? Cette presse libre, honneur de l’esprit français, clarté de tous les points à la fois sur toutes les questions, éveil perpétuel de la nation, où est-elle ?
– Qu’est-ce que c’est que cet homme ? – C’est le chef, c’est le maître. Tout le monde lui obéit. – Ah, tout le monde le respecte alors ? – Non, tout le monde le méprise (surtout le monde non occidental). – O situation ! Cet homme de ruse, cet homme de force, cet homme de mensonge, cet homme de succès, cet homme de malheur !
Oui, quelquefois, aux paroles superbes qui lui échappent, à le voir adresser d’incroyables appels à la postérité, à cette postérité qui frémira d’horreur et de colère devant lui, à l’entendre parler avec aplomb de sa «légitimité» et de sa «mission», on serait presque tenté de croire qu’il en est venu à se prendre lui-même en haute considération et que la tête lui a tourné au point qu’il ne s’aperçoit plus de ce qu’il est, ni de ce qu’il fait.
Il croit à l’adhésion des prolétaires et de ses citoyens musulmans, il croit à la bonne volonté des présidents étrangers, il croit à la fête des seigneurs de l’argent, il croit aux harangues de son minuscule parti (LRME, cette machine qui mène la France en marche arrière), il croit aux bénédictions des religieux (y compris les dignitaires de la Mosquée de Paris, que son dirigeant Hafiz s’active à crifiser – cette forme de sionisation de l’islam de France opérée sous l’égide du Crif –, ont appelé à voter pour lui), il croit au serment qu’il s’est fait jurer…d’être réélu président !
Adaptation personnelle d’un texte de Victor Hugo, Napoléon le Petit.
K. M.
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