Les dessous de la fausse censure de l’interview de Ferhat Mehenni par CNews
Par Nabil D. – La «censure» de l’interview du chef de file du mouvement séparatiste MAK par la chaîne française CNews a fait beaucoup de bruit. Sur les réseaux sociaux notamment. Pourtant, il n’en est rien. L’entretien que le journaliste islamophobe Ivan Rioufol a concocté avec Ferhat Mehenni n’a été que reporté pour des raisons tactiques, en parfaite coordination avec l’Elysée et le Quai d’Orsay. C’est que la date choisie par la chaîne de Vincent Bolloré tombait mal, à quelques jours de la visite que la Première ministre, Elisabeth Borne, s’apprête à effectuer en Algérie.
Les autorités françaises ont voulu éviter une énième annulation d’une visite du chef de l’Exécutif à Alger, après celles d’Edouard Philippe et Jean Castex qui avaient été remises aux calendes grecques suite à des actions ou des propos jugés provocants par les autorités algériennes. C’est le concerné lui-même qui en a fait la révélation dans un de ses «discours» à ses adeptes, dans lequel, par ailleurs, il a annoncé que son intervention sur CNews – la «chaîne fasciste», comme l’a classée Edwy Plenel – n’avait pas été annulée mais uniquement reportée. Son intervieweur, qui brandit son catholicisme et son islamophobie comme un cow-boy dégaine son Colt, n’a pas réagi officiellement à ce contretemps. C’est à peine s’il a concocté une vidéo enregistrée en off et filmée en contre-plongée – pour les besoins de l’intrigue –, le montrant avec le chanteur qui lui explique que «l’ordre est venu d’Alger».
Mais pourquoi Ivan Rioufol tient-il tant à faire parler le «président kabyle» ? Il y a plusieurs raisons, fait-on constater. Il faut d’abord rappeler que le journaliste nourrit une haine viscérale envers la communauté musulmane dont il a affirmé, sans rougir, que «50% se réclament de l’idéologie de l’Etat islamique». De Daech donc. L’auteur de l’essai intitulé De l’urgence d’être réactionnaire voit dans Ferhat Mehenni le porte-voix idéal pour dézinguer l’Algérie qui «occupe la Kabylie» comme la Russie «a envahi l’Ukraine», un comparatif, s’il est ridicule, ne lui sert pas moins, croit-il, d’argument pour gagner la sympathie de l’Occident. C’est dans cet ordre d’esprit que le réfugié parisien a, justement, adressé une lettre au secrétaire d’Etat américain, Antony Blinken, se faufilant tel un lézard des murailles dans l’interstice de la Chambre des représentants, pour appeler ce dernier à sanctionner l’Algérie «pion de la Russie» et soutien des «terroristes du Polisario et du Hamas» (sic).
L’interprète de Tahya briziden (vive le président) n’a pas manqué de rappeler au destinataire de son courrier que lui et son mouvement jouissent de l’empathie du régime marocain et d’Israël, une façon d’attirer son attention sur son asservissement total à ces deux Etats voyous, escomptant une geste de Washington dans le sens, sinon d’une reconnaissance du moins d’une protection de son organisation classée terroriste en Algérie.
Ferhat Mehenni apparaîtra donc bel et bien sur CNews, mais après la visite d’Elisabeth Borne, qui sera à Alger ce dimanche, flanquée de seize ministres. Une fois les accords signés et la responsable française de retour à Paris, la voie sera de nouveau libre devant les Sergueï Jirnov algériens.
N. D.
Comment (44)