Bakhmout : la guerre ce n’est pas du cinéma, c’est l’histoire qui s’écrit !
Une contribution d’Ali Akika – Dès la chute de Bakhmout, la pluie des fakes news a inondé les médias connectés directement aux services de la désinformation de Kiev et des instituts des services secrets anglais (MI6). Le rôle de ces instituts est de produire des fake news pour cacer les coups encaissés par les Ukrainiens pour mieux vanter leurs «exploits» qui ne sont souvent que des montages d’images soutenues par des voix off racontant ce que les images ne racontent pas (1). Ces traficotages de l’info ont un nom chez nous, cacher le soleil avec un tamis. C’est ainsi, le 20 mai, dans la ville de Bakhmout, comme en janvier 2023 à Solédare, les Ukrainiens ont mis du temps à reconnaître leur défaite. Le tamis chez eux, c’est cette machine à produire de la désinformation. Celle-ci, élaborée dans des laboratoires jouant sur l’ignorance et les préjugés pour faire gober n’importe quel mensonge à certains publics. Le marché/souk de la propagande est devenu un lieu où l’on échange la complexité et vérité du réel contre le simplisme de la fiction propice à l’éclosion de fantasme délirant. Celui-ci apaise et permet de remonter le moral de l’armée, de l’opinion. Les médias de nos jours accomplissent le rôle des fous du roi de jadis. Les rois modernes d’aujourd’hui s’entourent d’une multitude de bouffons spécialisés pour amuser la galerie ou bien faire oublier les mauvaises nouvelles provenant de tout le pays.
Passons sur ces petits jeux de la propagande et intéressons-nous à la chute de Bakhmout. Cette ville est devenue le Fort Alamo de John Wayne, forteresse, selon le président Zelensky, qui refusa de l’évacuer car stratégique militairement et politiquement pour devenir finalement un symbole. Un symbole cher payé avec des milliers de morts. Les fous du roi dans le monde vinrent au secours de Zelensky, en sortant une carte appelée tactique de l’attrition pour ne pas dire d’une façon hypocrite boucherie humaine. Zelensky et ses fous du roi auraient pu éviter de tomber dans le piège tendu par le général Sourovikine. Pour faire court, je résume mes articles sur Alegeriepatriotique de janvier et mars 2023. Sourovikine nommé chef d’état-major évacua Kherson. Pour rassurer l’opinion russe, il fit un interview, rare pour un militaire russe, pour expliquer sa décision. Il prononça deux phrases, évacuer Kherson pour aller épuiser l’ennemi à Bakhmout. Aujourd’hui, tout le monde sait que la «boucherie» a touché plus les Ukrainiens que les Russes sauf que les sacrifices des Russes se sont traduits par une victoire.
Les habituels «experts» ont zappé la déclaration télévisée de Sourovikine, préférant la grandiose «fête» de la «libération» de Kherson avec la présence de Zelensky. Ce dernier a dû être grisé par sa «victoire» à Kherson pour rêver de renouveler pareil «exploit» à Bakhmout. «Nos» experts et Zélensky, sans doute prisonniers de leur formatage idéologique, n’ont pas dû prendre au sérieux Sourovikine. En bon stratège, ce dernier a appliqué les ressources de l’art opératif qui implique que toute action ou engagement tactique doit servir la stratégie. Dans le choix entre Kherson et Bakhmout, le général russe a choisi Bakhmout pour épuiser l’ennemi et entraver les plans de guerre des Ukrainiens. Et la fameuse contre-offensive ukrainienne a d’ores et déjà fait les frais du désastre de Bakhmout. Il n’y a que les aveugles, pour rester poli, qui ne voient que ladite contre-offensive qui se fait attendre fait du surplace pour deux raisons. Si l’on considère que l’objectif de Zelensky et des Américains c’est la prise de la Crimée, la route de la victoire passe par deux endroits. Soit par Zaporijjia, soit Kherson qui se trouvent sur le grand fleuve de Dniepr, frontière naturelle.
Les Ukrainiens ont testé le terrain en envoyant des forces spéciales détecter et évaluer la meilleure brèche pour traverser le fleuve. Echec total ! Les Russes, rigoureux contrairement à l’idée que se font les imbéciles de cette puissante armée, ont pris soin de bombarder les bases de dépôts de matériels et d’armes ainsi que les lignes de communications. Alors que les Américains avaient déclaré qu’ils avaient fourni 98% du matériel demandé par les Ukrainiens. Zelensky sauta sur les 2% manquants pour demander un peu plus de temps. Tout ça, c’est du bluff, du pipeau car, en vérité, Bakhmout était le plan B pour la contre-offensive. Bakhmout étant une ville dotée des meilleures lignes de défense du pays et déclarée forteresse par Zelensky devait être l’endroit d’où s’engouffreraient les troupes de la contre-offensive. Sauf que les troupes qui devaient accueillir leurs frères de la contre-offensive et les approvisionner une fois à l’intérieur des lignes ennemies.
Toute cette architecture tomba à l’eau. Absence de troupes décimées à Bakhmout qui ne peut donc pas accueillir la contre-offensive ni servir de base arrière. La chute de Bakhmout est véritablement un séisme pour les Ukrainiens. Outre l’épuisement de l’armée, les villes et villages qui protégeaient Kramatorsk siège du commandement militaire, la chute de Bakhmout (plan B), c’est tout un rêve qui s’évapore. Pour cacher ce désastre politico-militaire reste la désinformation reposant sur les fake news citées au début de l’article. Là aussi, la guerre dite de l’info va leur réserver des surprises. On ne cache, et encore moins, enterre le réel quand on adopte des outils non aptes à saisir la complexité du réel. Ce débat entre réel et idée pose quelque problème au Vieux Monde. Ainsi, la désinformation dans le camp otanien est devenue une arme «magique» en lui conférant une illusoire capacité de transformer une défaite réelle en «victoire» fantasmée. C’est une vieille lubie de la métaphysique pour qui les «idées» abstraites mènent le monde, lubie qui eut la caution du philosophe allemand Hegel. Un autre philosophe, allemand lui aussi, Karl Marx, a rappelé à l’immense Hegel que les idées remplissent ce rôle à condition que l’on sache que la réalité (histoire) enfante lesdites idées qui nourrissent la conscience de l’être. D’où la gentille pique de Marx en invitant Hegel à cesser de faire marcher la philo sur la tête et de faire appel plutôt aux pieds.
Mais revenant à l’Ukraine et l’hystérique activité de fake news pour faire oublier la chute de Bakhmout. Les stratèges américains des «Révolutions orange» ont introduit la manipulation des fake news dans le brouillard de la guerre. Cette notion de brouillard, on la doit à Karl von Clausewitz. Cet officier prussien entendait par là que la guerre ne se déroule pas sur une carte d’état-major où le moindre détail serait prévu sans l’ombre de la moindre anicroche. Car derrière l’immense toile d’araignée qui masque la vraie guerre sur les champs de bataille, il y a beaucoup d’inconnus que le meilleur des stratèges ne peut résoudre, ni anticiper. Et pour faire face à tous les dangers, les pièges, les ruses, les leurres doivent être traqués par le stratège. En un mot, le vrai stratège cache ses secrets et cherche pénétrer ceux de l’adversaire. Avec la guerre en Ukraine, on s’aperçoit que les idéologues et les propagandistes se sont emparés de cette notion pour cacher plutôt l’impuissance de leur camp ou justifier des fautes graves, tant sur le plan militaire que politique.
«L’aventure» de la contre-offensive que tout le monde attend est l’exemple qui obéit à l’expression cacher le soleil avec un tamis. Annoncer une telle bataille qui est une erreur et la remettre sous de prétextes bidons se transforme en faute. L’histoire retiendra que cette agitation est propre à la société des spectacles analysée par Debord, cinéaste et essayiste. Car la guerre, ce n’est pas du cinéma mais obéit aux contraintes du terrain et du mouvement produit par les dynamiques de la guerre. Ainsi, un stratège ne décrète pas un lieu stratégique qui s’avère être par la suite une décision irréfléchie.
Le Vieux Monde croit encore qu’il est le seul à posséder la boussole et la lumière dont il serait le seul propriétaire. Faute grave et imbécile connue dans le lexique de l’art de la guerre sous la notion de ne jamais sous-estimer l’adversaire pas plus que surestimer ses propres forces qui sont souvent les fruits d’un nombril/ego démesuré…
Ainsi, en dépit des chutes de Marioupol et aujourd’hui de Bakhmout, les experts-perroquets répètent à satiété les déboires de l’armée russe, une armée qui occupe 20% de l’Ukraine. Alors que l’Ukraine dépend du bon vouloir des Etats-Unis, aussi bien dans la fourniture de matériel que du calendrier d’une future négociation. Avant de conclure sur les piliers de l’art de la guerre produit de l’expérience de l’histoire qui a engendré la pensée stratégique, un petit regard sur nos propagandistes qui ne reculent pas devant leurs propres énormités en voyant le sol se dérober sous leurs pieds. La raison ? De leur bouche sortent très souvent un mot de mépris contre les Russes, une insulte qui trahit leur haine/peur de la Russie. Ils ont oublié que l’on peut se servir des mots pour d’autres utilisations. Par exemple, pour percer le mystère de l’étrangeté qui surgit ici et là, dans des lieux de nulle part. Car les mots, ces précieux auxiliaires de la pensée, sont allergiques aux fautes de goût infligées à l’élégance d’une langue, de toutes les langues. D’où la nécessite d’identifier les matériaux qui construisent des idées trempées dans l’acier qui ne s’évaporent pas comme les volutes de fumée.
Pour conclure, cet Occident, si sûr de lui, tente de ramener à lui ce monde qu’ils ont colonisé ou malmené. Il pense pouvoir le convaincre en effaçant l’histoire des peuples tout en les invitant à les aider à faire respecter le droit international. Blague de mauvais goût quand on pense à l’Irak et à la Palestine qui, à aucun moment, ne sont cités dans leur «furieuse» envie de respecter le droit international. Pour que le monde croit à cette promesse, encore faut-il que le gendarme du monde accepte au moins de remplacer sa devise «le temps, c’est de l’argent (times is money) et comprenne que le temps ne s’achète pas. Et c’est cette manie de transformer tout en marchandise qui a fait le malheur du monde. Un «mystère» demeure, comment se fait-il que les «experts» et une catégorie de journalistes persistent à claironner les mêmes inepties de nos jours, alors que leurs aînés coupables d’énormités sur l’Irak sont des exemples à ne pas suivre ?
A. A.
1- Exemple donné par un porte-parole du commando qui attaqua la ville russe de Belgorod. Il se filme derrière un panneau indiquant les prochaines villes russes sur l’autoroute. Or, ce panneau n’est autre qu’une photo fixe, une technique banale dans le cinéma. On voit la différence entre l’image fixe de l’image filmée. Les arbres de la nature de l’image fixe sont gelés alors que le porte-parole s’agite dans l’image filmée.
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