Algérie-France : ce que Michel Barnier a déclaré lors de sa visite à Alger en 2004
Par Kamel M. – Le nouveau Premier ministre désigné par le président français, Emmanuel Macron, ce jeudi, s’est rendu à Alger en juillet 2004, lorsqu’il présidait aux destinées du Quai d’Orsay sous Jacques Chirac. Ses déclarations à l’époque paraissent tellement décalées, après vingt ans marqués par des hauts et des bas dans les relations entre l’Algérie et la France, et de grands bouleversements survenus dans la région. Michel Barnier avait paru très optimiste dans la longue déclaration qu’il avait faite devant la presse, aux côtés de son homologue algérien, Abdelaziz Belkhadem. Les deux pays partageaient les mêmes visions et les mêmes positions sur de nombreux dossiers internationaux, notamment sur la question irakienne, Paris comme Alger ayant refusé, à l’époque, de prendre part à la coalition internationale qui allait agresser ce pays.
Michel Barnier paraissait aussi sincère que le président Jacques Chirac et le chef de la diplomatie, Dominique de Villepin. Une nouvelle page semblait avoir été ouverte et des perspectives prometteuses paraissaient se profiler à l’horizon, avant que l’avènement de Nicolas Sarkozy au pouvoir, en mai 2007, ne fasse revenir les deux pays à la case de départ, à ce jour. «J’ai été très touché, croyez-moi, de cette première visite comme ministre français des Affaires étrangères, et je suis très ému à cette occasion. Je suis heureux de la qualité de l’amitié avec laquelle j’ai été reçu», avait affirmé le nouveau locataire de Matignon, qui prend ainsi les commandes d’un gouvernement qui sera difficile à former dans le contexte politique chaotique français actuel.
«Nous sommes particulièrement touchés que le président [Bouteflika] ait accepté de venir […] de l’autre côté de la Méditerranée pour participer aux cérémonies commémoratives du Débarquement dans le sud de la France. C’est un geste de la part du président algérien qui nous va droit au cœur et qui sera l’occasion, ensemble, de saluer la mémoire de beaucoup de soldats algériens qui sont morts à l’occasion de ce débarquement et de remercier les vétérans algériens qui ont participé à la libération du continent européen et de nos pays», avait souligné l’ancien ministre des Affaires étrangères. «Les relations entre nos deux pays ont pris un nouvel élan», avait-il assuré.
«Il faut nous mobiliser comme nous l’a demandé le président [Chirac], à travers l’engagement personnel des ministres, des parlementaires, des collectivités territoriales pour nourrir et concrétiser les relations entre nos deux peuples qui éprouvent l’un pour l’autre, et depuis longtemps, ce que le général De Gaulle, qui a beaucoup compté pour mon engagement personnel, a appelé un attrait particulier et élémentaire entre Français et Algériens», avait encore déclaré Michel Barnier, qui annonçait la préparation «concrète» d’un traité d’amitié algéro-français. Un traité qui portait déjà sur le travail de mémoire.
«Il y a ce que nous voulons et ce que nous devons faire ensemble, pour la paix, la stabilité, le progrès partagé entre nos deux peuples. Et puis il y a ce que nous pouvons faire ensemble, Algériens et Français, sur cette rive de la Méditerranée ou partout ailleurs dans le monde», avait renchéri, optimiste, le successeur de Gabriel Attal, qui s’était dit «très frappé par la convergence de [nos] analyses, des positions très fortes de l’Algérie, qui est membre du Conseil de sécurité actuellement, devant les grands conflits, les grands problèmes qui nous concernent tous».
Abordant la question du Sahara Occidental, Michel Barnier avait estimé qu’une «solution politique» devait être trouvée. «Cette question, selon nous, doit être agréée par les parties dans le cadre des Nations unies», avait-il appuyé, en exhortant les dirigeants algériens et marocains à «dialoguer franchement». «Nous pensons, pour cette question importante du Sahara Occidental et dans le cadre des Nations unies, après le travail qui a été fait par M. Baker et M. Alvaro de Soto, nouveau représentant spécial du secrétaire général des Nations unies, que ce dialogue entre ces deux pays sera très vite fondamental, et nous l’encourageons», avait-il conclu. Depuis, les relations entre les deux voisins maghrébins se sont dégradées en raison de la politique belliqueuse et hostile du Makhzen, encouragée par le soutien inconditionnel des successeurs de Jacques Chirac au régime despotique et expansionniste de Rabat.
Michel Barnier qui retrouve, deux décennies plus tard, une Algérie fâchée avec la France de Macron, recollera-t-il les morceaux ?
K. M.
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