Musulmans stigmatisés : le CFCM pointe une «manipulation nauséabonde»
Par Nabil D. – Le Conseil français du culte musulman (CFCM) a déploré la «grave dérive que prend le traitement médiatique» en France. «Ce traitement partisan et orienté de l’information, qui a pour but de faire de l’islam et des musulmans un sujet anxiogène et de préoccupation majeure pour [les citoyens français], de distiller la peur et, parfois même, d’inciter à la haine, doit être dénoncé et combattu», estime cette organisation cultuelle indépendante.
«En effet, force est de constater que lorsqu’un fait divers se produit et que la consonance du prénom du suspect laisse à penser qu’il serait musulman, tout est fait dans certains médias [français] pour lier cette actualité à l’islam et aux musulmans, même lorsqu’elle n’a aucun rapport avec la religion», fait remarquer le CFCM, dans un communiqué parvenu à notre rédaction.
«Le prénom du suspect à connotation musulmane apparaît partout, et devient presque un sujet plus important que l’acte ou le délit lui-même. Les faits font alors l’objet d’une couverture médiatique exceptionnelle, et les musulmans sont pointés du doigt dans leur ensemble», dénonce le CFCM, qui précise qu’«à l’inverse, lorsque des faits concernent des individus dont le prénom ne serait a priori pas à connotation musulmane, le prénom en question n’apparaît presque jamais et laisse place à l’anonymat». «Les affaires en question sont, quant à elles, très vite ignorées, abandonnées et disparaissent rapidement [des] médias, y compris lorsqu’elles sont extrêmement graves», souligne le Conseil français du culte musulman, qui prend comme exemple l’attaque au couteau qui a eu lieu en Australie, samedi dernier, faisant six victimes et des blessés dont un bébé.
Cette attaque «a d’abord fait la une de la chaîne CNews avec des spécialistes qui expliquaient en direct que le suspect serait d’origine orientale et que l’Australie nous paraît être un pays calme, mais il y a eu de multiples incidents liés à l’islam radical et au terrorisme», note le CFCM, en soulignant que, «quand on a appris que l’assaillant s’appelait Joël Cauchi, ce média a immédiatement cessé de porter un intérêt quelconque à ce drame».
Le CFCM se réfère à une enquête du journal Mediapart traitant de cette dérive médiatique, qui révèle qu’un rédacteur en chef de la chaîne CNews aurait envoyé, dans un groupe WhatsApp de la rédaction, la consigne suivante pour le traitement d’un fait divers dans un collège de Cholet : «Affaire de Cholet, laisse tomber ! Il n’y a eu aucune référence au Coran !» «Le fait pour [les médias français] de se concentrer uniquement sur les méfaits commis par des individus musulmans ou présumés comme tels, et de les amplifier, tout en délaissant d’autres actualités parfois plus graves mais qui ne peuvent être liées à l’islam, participe d’une manipulation et d’une propagande nauséabonde contraire à la déontologie journalistique et au traitement juste, équitable et objectif de l’information», s’insurge le CFCM.
Ces pratiques antidéontologiques des médias français sont «une des sources du racisme et des actes antimusulmans qui ne font que croître dangereusement» en France, s’inquiète le CFCM.
N. D.
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